Monday, 24 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 14

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 434-436]

   L’ouverture d’un port franc procure aux consommateurs de l’intérieur du pays, un autre avantage d’une haute importance, c’est celui de diminuer l’avance de l’impôt qu’ils ont à rembourser sur les objets qu’ils consomment. Lorsque la douane sur les marchandises taxées est payée à l’entrée du port, le marchand importateur fait l’avance de l’impôt, et se fait ensuite rembourser, avec un profit proportionné, par le marchand en gros, celui-ci par le marchand en détail, et ce troisième par le consommateur. Cette triple avance, en ne la comptant qu’à dix pour cent, ajoute 33 fr., dix cent. pour cent à la somme de l’impôt que le consommateur est forcé de rembourser; mais si l’importateur décharge ses marchandises dans un port franc, il y trouve aussi à les vendre à des marchands en gros, qui se chargent d’en faire la distribution à tous les boutiquiers de la nation. Ni l’un ni l’autre ne fait point l’avance de l’impôt, qui n’est déboursé qu’au moment où la marchandise part du port franc, pour être transportée dans le magasin où elle doit être vendue en détail. Alors le consommateur ne doit rembourser qu’une seule avance d’argent, celle du marchand en détail; en sorte qu’il ne sort de la bourse du contribuable, que dix pour cent de plus qu’il n’entre dans le trésor public; et si, comme on le fait en Angleterre, la douane accorde un crédit de six ou neuf mois au marchand en gros, pour payer sa contribution, celui-ci faisant jouir de cette faveur le marchand en détail, le dernier n’exige du consommateur, rien au delà du remboursement de l’impôt perçu sur la consommation; en sorte qu’on atteint alors au moyen des ports francs, le but qu’on doit se proposer dans tout impôt, de ne faire payer au contribuable que le moins qu’on peut au delà de ce qui entre dans le trésor public. C’est bien aussi en rabaissant considérablement le prix de toutes les marchandises taxées, que l’ouverture du port de Livourne, dont les franchises sont parfaitement bien réglées a contribué à la prospérité de la Toscane.

[Translation]

   The opening of a free port gives home consumers another advantage of great importance: that is, diminishing the advance of tax which they have had to repay on the goods that they consume. When the customs duty upon the taxed commodities is paid on their entry into the port, the importing merchant makes advance on tax, and later has it repaid, with a proportional profit, by wholesale merchant, who are repaid by retailing tradesmen, who are repaid by consumers. This triple advance, supposing that the tax rate is only ten per cent, adds 33.1 per cent to the sum of the tax the consumer is forced to repay. However, if the importer unloads his commodities at a free port, he can find ways there to sell them to wholesale merchants, who take the task to distribute them to all retail merchants in the country. Neither of these makes advance on the tax, which is only paid when the commodity leaves the free port to be transported to the store where it should be retailed. Then, the consumer must repay only one advance of money made by the wholesale merchants. As a result, the sum going out of the bag of the tax payer is only ten per cent more than that coming into the treasury. And, if, as in England, the customs accords six or nine months of credit to the wholesale merchant, to pay his contribution, this making the retail merchant enjoy this favour, the retail merchant asks the consumer for no more than repayment of the tax collected upon the consumption. As a result, the means of the free ports conforms to the principle according to which any tax should be designed, namely making a tax payer as little more as possible than the public treasury receives. Moreover, by making the price of taxed commodities much lower, the opening of the port of Livorno, whose franchises are perfectly well regulated, has contributed to the prosperity of Tuscany.

Sunday, 23 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 13

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 430-434]

   Les étrangers qui s’établissent dans les ports francs, ne se bornent point à y faire le commerce de transport, ils s’y trouvent placés avantageusement pour le commerce d’exportation et d’importation; en sorte que leurs capitaux remplacent alternativement, ceux de la nation au milieu de laquelle ils sont établis, et ceux des étrangers; la certitude de trouver un marché si rapproché, si vaste, et si bien fourni, augmente la rapidité de la circulation dans les Provinces voisines, et y procure un grand avantage, soit aux consommateurs, soit aux artisans. Les marchands étrangers domiciliés dans les ports de mer, se laissent même souvent tenter de retirer leurs capitaux du commerce extérieur, pour les destiner uniquement à maintenir l’industrie du pays au milieu duquel ils s’établissent: c’est ainsi que j’ai vu à Livourne, des capitaux considérables d’Anglais et d’Allemands, employés par des marchands de ces deux pays à des défrichements de terre; et que des Marseillais que la révolution avait forcé de se réfugier également à Livourne, ont employé dans le voisinage de cette ville, les fonds qu’ils avaient tiré de France, à y établir un très grand nombre de savonneries, et d’autres manufactures (2). En général tout le pays qui avoisine un port franc, est bientôt saturé de capitaux; car ceux que les étrangers y déposent, refluent rapidement vers le commerce intérieur, les manufactures, et l’agriculture, si ces diverses branches leur offrent de plus grands profits que le commerce de transport.

[Translation]

   The foreigners settled in the free ports do not only do shipping trade there; they are also advantageously placed for export and import trade. As a result, their capitals replace alternately those of the nation among whom they have settled themselves, and those of foreigners. The certainty of finding such a nearby, extensive, and well provided market increases the rapidity of circulation in the neighbouring provinces, and procure a great advantage for them, either for consumers or for artisans. The foreign merchants located at the sea ports may often even attempt to withdraw their capitals from foreign trade, to allot them exclusively to maintenance of industry of the country where they are settled. Thus, Livorno has had considerable capitals of the English and Germans, employed by merchants from these two countries for reclamation of land; merchants from Marseilles, forced to take refuge in Livorno, too, by the revolution, have employed in the suburbs of this city the money that they withdrew from France, to establish a greatly large number of manufactories of soap and other commodities (2). In general, any neighbouring country of a free port is soon filled with capitals, because the capitals which the foreigners place there flow rapidly towards home trade, manufactures, and agriculture, if these different branches offer them larger profits than shipping trade.

Saturday, 22 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 12

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 429-430]

   Loin que l’établissement d’un port franc ait fait prématurément passer les capitaux à un commerce de transport, il a eu le plus souvent l’effet contraire, celui d’attirer des capitaux étrangers vers le commerce intérieur. Les nations capitalistes, qui sont toujours en cherche d’un trafic nouveau, dans lequel elles puissent employer leurs fonds surabondants, regardent tous les ports francs comme étant pour elles une seconde patrie. En effet, l’on trouve à Livourne, à Gênes, à Ancone, à Trieste, et même à Venise, des colonies de riches marchands Hollandais, Anglais, Hambourgeois, Genevois, Levantins, qui y ont fixé leur habitation, et qui font de ces ports le centre de leur commerce. Outre les fonds qui leur appartiennent en propre, ils négocient souvent aussi sur des capitaux qu’ils ont obtenu dans leur pays, au moyen de leur crédit. Les cinq sixièmes des capitaux du commerce de Livourne, sont étrangers à la Toscane; il est probable qu’il en est de même dans les autres ports francs, excepté cependant celui de Gênes; cette République ayant accumulé depuis long-temps des capitaux immenses, qu’elle ne peut employer autrement que dans le commerce extérieure.

[Translation]

   The establishment of a free port, free from directing capitals prematurely to shipping trade, has had the most often had the contrary effect: that is, of drawing foreign capitals towards home trade. The capitalist nations, always in search for a new business in which to employ their abundant funds, regard all the free ports as being their second home countries. In fact, Livorno, Gênes, Ancona, Trieste, and even Venice have colonies of rich merchants from Holland, England, Hamburg, Geneva, and the Levant, who settle themselves there, and turn these ports into the centre of their trade. In addition to the money in their possession, they deal, often using the capitals that they have obtained in their country by means of credit. Five sixth of the commercial capitals in Livorno are from outside Tuscany. It is probable that the same is true of all other free ports, except that in Gênes; this republic has accumulated such huge capital for a long time, that she cannot employ it anywhere else than in foreign trade.

Friday, 21 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 11

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 428-429]

   Le marché général du monde commerçant, dans lequel il ne peut y avoir ni privilége exclusif, ni monopole, offre nécessairement un bénéfice moins considérable, que le marché d’un pays particulier, où les capitaux manquent, et où les capitalistes profitent de leur petit nombre pour élever le taux de leurs gains. Lorsque Louis XIV accorda au mois de Mars 1669 une franchise générale au port de Marseille, il ne donna, ni ne put donner par là, aucun avantage aux Marseillais sur les Hollandais, qui étaient déjà en possession du commerce de transport. Si les derniers se contentaient à cette époque d’un bénéfice de dix pour cent, et que les premiers en trouvassent quinze ou seize, dans les manufactures de Provence, le commerce intérieur, ou le commerce extérieur de consommation; on ne peut croire que les Marseillais renonçassent au bénéfice le plus considérable, pour se contenter du moindre, afin de profiter de la franchise de leur port. En effet le commerce de Marseille, autant qu’il était fait par des Français, n’était point un commerce de transport, mais un commerce extérieur de consommation, quelquefois direct, et quelquefois circuiteux. Cependant s’il était arrivé que les Marseillais ne trouvassent dans aucun commerce national, les mêmes bénéfices qu’ils pouvaient trouver dans le commerce de transport; c’aurait été un signe certain, qu’ils étaient plus riches que toutes les nations avec lesquelles ils se trouvaient en concurrence et par conséquent, qu’ils étaient en état de faire le commerce de transport. La proportion des profits au capital va en décroissant, ainsi que nous l’avons vu, comme les capitaux augmentent; et la nation qui se contente des moindres profits, doit toujours être la plus riche.

[Translation]

   The general market of the commercial world, in which there can be no exclusive privilege or monopoly, offers by necessity a smaller profit than the market of a particular country which is short of capital, and where capitalists gain from their small number to raise the rate of their profit. When Louis XIV accorded in March 1669 a general franchise to the port of Marseilles, it did not give, nor could it give, any advantage to Marseilles merchants over the Dutch, who were already in possession of shipping trade. If the Dutch were contented with ten per cent of profits in this period, and the Marseilles merchants found fifteen per cent in manufactures in Provence, home trade or foreign trade for consumption, it is unbelievable that the Marseilles merchants gave up the higher profit to be contented with the lower, for the purpose of enjoying the franchise of their port. In fact, the trade in Marseilles, as long as carried out by the French merchants, was not a kind of shipping trade but foreign trade for consumption, sometimes direct or other times indirect. However, if the Marseilles merchants had happened to find in any home trade the same profits as they were able to find in shipping trade, this would have been a certain sign that they were richer than any nation with whom they turned out to be in competition, and, therefore, that they could afford to carry out foreign trade. The proportion of the profits to the capital is lower, as we have seen, as capital is more accumulated, and the nation contented with the lowest profits should always be the richest.

Thursday, 20 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 10

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 426-427]

   Les principales villes auxquelles on a accordé le privilège de Port franc, sont Baïonne, Dunkerque, Marseille, Gênes, Livourne, Ancone, et Trieste: leur franchise n’a pas plutôt été assurée, qu’on a vu les capitaux mercantiles s’y multiplier, et les dernières de ces villes devenir l’entrepôt de tout le commerce de la méditerranée. Jamais le succès n’avait répondu plus pleinement aux vues du Gouvernement. M.r Herrenschwand a pris acte de cette prospérité des ports francs pour les décrier. «L’établissement prématuré des ports francs, dit-il, tend directement à faire descendre la nation, du degré de prospérité dont elle jouit au moment où les ports francs s’ouvrent; car les commerçants nationaux, pour pouvoir entreprendre le commerce extérieur de transport, auquel ils seront invités par les ports francs, seront obligés de retirer graduellement leurs capitaux, soit des branches du commerce intérieur, soit de celles du commerce extérieur de consommation (1)». Mais dans cette occasion comme dans bien d’autres, M.r Herrenschwand en adoptant les principes d’Adam Smith, se trompe sur les faits auxquels il en fait l’application. L’établissement d’un port franc n’invite aucun capital à faire le commerce de transport; car il ne lui assure ni monopole, ni bénéfice supérieur à tout autre; il le décharge seulement d’une perte que ce commerce ne pourrait supporter.

[Translation]

   Among the principal cities to which the privilege of Free Port has been accorded are Bayonne, Dunkirk, Marseilles, Gênes, Livorno, Ancona, and Trieste. Their franchise had hardly been accorded when their mercantile capital began multiplying, and the last five cities became the centre of all Mediterranean trade. At no other time had any intention of the government ever been more successful. Mr Herrenschwand has recorded this prosperity of the free ports to decry them. He says: “The premature establishment of free ports leads directly to the decline of the nation, in the degree of the prosperity that she enjoys when the free ports are opened. The reason is that national merchants, to afford to undertake foreign shipping trade to which they will be invited by the free ports, will be obliged to withdraw gradually their capital from branches of home trade or from those of foreign trade of consumption”(1). However, on this occasion as well as on many others, Mr Herrenschwand, adopting the principles of Adam Smith, misunderstands the facts to which he applies them. The establishment of a free port invites no capital to shipping trade, because this assures capital no monopoly or superior profit to any other; this only saves it from sustaining a loss that this trade could not sustain.

Wednesday, 19 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 426]

   C’est pour parer à cet inconvénient, que plusieurs Gouvernements ont pris le parti de mettre quelques villes, ou quelques ports de mer, en dehors de l’Etat, s’il est permis de s’exprimer ainsi, ou du moins en dehors de l’enceinte de ses douanes; de telle sorte que leur impôt se perçoive, non point pour entrer dans ces villes, mais pour passer de ces villes dans le reste de l’Etat. Les Anglais ont dans le même but, mis en usage un autre expédient, c’est de rendre à la sortie, sous le nom de drawback, l’impôt qu’ils ont prélevé à l’entrée. Cette restitution est quelquefois désignée sous le nom impropre de prime, par les économistes Français.

[Translation]

   In order to overcome this inconvenience, several governments have decided to put some cities or seaports outside the state if she is permitted to declare so, or, at least, beyond the reach of her customs. As a result, their tax is not levied upon entrance into these cities but upon passage from these cities to the rest of the state. For the same purpose, the English have used another expedient, that is, of repaying the collected import tax at the time of exportation in the name of drawback. The French economistes have sometimes designated this repayment by the improper name of bounty.

Tuesday, 18 January 2011

Book 3, chapter 9, paragraph 08

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 425]

   Cependant les douanes de presque toutes les autres nations, prélèvent des droits bien supérieurs à ceux-là; rarement ils sont moindres du dix pour cent, souvent ils vont fort au delà. Il serait absolument impossible, que des marchandises débarquées aujourd’hui à Nantes, à Bordeaux, etc. après avoir payé les droits selon le tarif, pussent être ensuite réexportées et vendues à des étrangers; cela serait encore impossible, pour toutes celles qui resteraient assujetties à l’impôt, quand même on aurait réduit la douane à n’être plus qu’une contribution. La perte du marchand serait trop considérable, car l’étranger n’étant point soumis à notre monopole’, notre prix accidentel ne règle point son prix relatif.

[Translation]

   Nonetheless, the customs of almost any other nation levies much higher taxes than the Dutch. The taxes are rarely lower than ten per cent, and often much higher. It would be completely impossible for commodities unloaded today at Nantes, Bordeaux, or another to be re-exported and sold to foreigners after having paid the taxes according to the tariff. It would be also impossible for all those which would remain subject to the tax, even if the customs duty were reduced to no more than a contribution. The loss of the merchant would be too much, because, foreigners not being subject to our monopoly, our incidental price does not regulate their relative price.