Monday 19 April 2010

Book 3, chapter 2, paragraph 33

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 192-194]

   AUBE. Le Département de l’Aube est du petit nombre de ceux dont les manufactures sont favorisées par le monopole que donnent les douanes. L’on avait établi dans la ville de Troyes une manufacture d’étoffes de coton, à l’imitation des Anglais que l’on voulait rivaliser; mais les basins, futaines, piqués, et toiles de coton, qui sortaient de cette fabrique, ne pouvaient et ne peuvent encore soutenir la concurrence des Anglais, qui travaillent mieux et à meilleur marché. La manufacture fut donc surtout florissante quand les anciennes prohibitions étaient maintenues dans toute leur force. L’année 1784 était l’époque de sa plus haute prospérité: le traité de commerce qui se fit peu après avec l’Angleterre, et qui affranchit les consommateurs de nombre d’extorsions, fit jeter les hauts cris à tous ceux dès fabricants dont la prospérité était artificielle. Ceux de Troyes furent obligés de diminuer progressivement le nombre de leurs métiers, dès cette époque jusques en 1792. Depuis lors la prohibition des marchandises anglaises leur a rendu de la vigueur, et ils se soutiennent en dépit de la dilapidation de leurs capitaux. Quelques pertes que leur aient causé le maximum, la chute des assignats, et une taxe révolutionnaire de 1,800,000 francs eu numéraire, qu’on les a forcés de payer, leur commerce est aussi actif qu’en 1791, parce qu’au moyen du monopole, ils ont attiré à eux les capitaux de l’agriculture, et des autres commerces plus réellement utiles au pays (18). Il paraît qu’il y a actuellement 1103 métiers travaillants pour cette manufacture, et qu’il en reste 367 qui ne sont point occupés. On ne peut savoir au juste quel était leur nombre, et la somme de leur produits avant le traité de commerce de 1786; car il y a à cet égard la plus grande contradiction entre les cit. Loiselet et Descolins d’une part, et le cit. Beugnot de l’autre; si l’on en croit les premiers qui cherchent à relever l’importance de la manufacture, elle occupait alors 3240 métiers, et produisait une valeur de 9,933,600 fr. D’après le second, ses produits n’auraient valu que deux millions; il ne paraît pas qu’ils aillent à présent fort au delà d’un million de francs.

[Translation]

   AUBE. The department of Aube is one of the few where manufactures are given preferential treatment by means of monopoly made possible by customs duties. In the city of Troyes, a cotton mill was built in imitation of the English ones that we wanted to rival. But the brocade, fustian, piqué, and cotton cloth, which came from this manufactory, could not and cannot still compete with the English counterparts, which are more productive at a lower cost. Therefore, the manufactory was, above all, flourishing when former prohibitions were maintained with all their force. The year 1784 saw the manufactory the most prosperous; the commercial treaty, which was concluded with England soon and which emancipated consumers from a number of extortions, provoked outcries against those manufacturers whose prosperity was artificial. Manufacturers in Troyes could not help diminishing gradually the number of their looms from this time to 1792. Since 1792, the prohibition of English commodities has permitted them to regain vigour, and they are sustained in spite of the misappropriation of their capitals. Whatever loss they may sustain thanks to the maximum price act, the collapse of assignats and a revolutionary tax of 1,800,000 francs in specie, which we could not help paying, their trade is as active as in 1791, because, by means of monopoly, they have attracted capitals from agriculture and other branches of trade which are really more useful to the country (18). It seems that there are at present 1103 weaving looms for this manufactory, and that 367 of them are left unemployed. No one can know exactly their number and the amount of their produce before the commercial treaty of 1786, because there is the greatest contradiction in this respect between the said Loiselet and Descolins on the one hand, and the said Beugnot on the other hand. If you believe the formers who try to emphasise the importance of the manufactory, then it employed 3240 weaving looms, and produced 9,933,600 francs in value. According to the latter, its produce was only worth 2 million. It does not seem that at present its produce is much more than one million francs.