Friday 31 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 11

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 280-81]

   Si le consommateur se refusoit [refusait] à abandonner au producteur une partie du superflu du travail, celui-ci n’auroit [aurait] plus aucun intérêt à employer ses capitaux accumulés pour augmenter ses productions, et il ne se feroit [ferait] plus dans la nation que cette espèce de travail brut, que faisoient [faisaient] les hommes dans l’origine des sociétés, et qui ne laisse aucun superflu. Loin donc que le consommateur eût gagné par son épargne, il perdroit [perdrait] toute cette partie du superflu dont il profite dans les échanges; en sorte qu’il est de son intérêt de payer toujours assez de salaire superflu, de profit, et de rente, pour encourager le travail perfectionné: ce travail qui lui donne un bénéfice très considérable n’existeroit [existerait] pas ne récompensoit [récompensait] ceux qui augmentent ses effets par l’emploi de leurs capitaux; et lorsqu’il traite avec eux au rabais, qu’il ne leur donne que le moins dont ils veuillent se contenter pour le servir, il est clair qu’il ne paye qu’un prix nécessaire, sans lequel la production seroit [serait] arrêtée, et qui par conséquent ne lui cause point de perte.

[Translation]

   If a consumer refused to give a producer a part of the surplus of labour, the latter would no longer take interest in employment of his accumulated capital for increase of his produce, and there would be no more in the nation than that sort of gross labour which man made at the beginning of the society and which left no surplus. Therefore, far from gaining from his saving, the consumer would lose all this part of the surplus from which he profits [benefits] in exchanges. Consequently it is in his interest to pay surplus wages, profit, and rent always enough to encourage the improved labour. This labour which give him extremely much benefit would not exist if he did not remunerate those who increase his enjoyment by employing their capitals. When he bargains with them over the price, when he gives them only the minimum with which they resign themselves to his benefit, it is clear that he pays only a necessary price, without which the production would come to a halt, and which in consequence causes no loss for him.

Thursday 30 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 10

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 279-80]

   Ce superflu peut être évalué en soi-même, ou relativement au revenu qu’il produit, et ces deux évaluations sont fort différentes. En soi-même, il est égal à la différence entre le travail qu’auroit [aurait] coûté la même production à un homme qui n’auroit [aurait] point été assisté par l’accumulation du travail antérieur de ses semblables, et le travail qu’elle a coûté à l’ouvrier productif: voilà en effet qu’elle est la quantité dont le perfectionnement du travail enrichit la société. Mais relativement au revenu qu’il produit, il ne faut point l’estimer ainsi, car on ne trouveroit [trouverait] jamais de consommateur qui formât de demande pour un travail aussi énorme; ou qui consentît à le rembourser comme s’il avoit [avait] été fait réellement. On ne demanderoit [demanderait] jamais, par exemple, qu’il se fabriquât des épingles, si l’acheteur devoit [devait] donner en échange pour les obtenir, les fruits d’un aussi grand travail que celui qui seroit [serait] nécessaire à un sauvage pour les faire. Il faut donc que ce superflu se partage entre les consommateurs et les producteurs; que les derniers offrent aux premiers un assez grand avantage pour les engager à se charger des fruits de leur industrie, et que les premiers abandonnent aux derniers un assez grand bénéfice, pour les engager à appliquer effectivement leur industrie, et l’accumulation de leurs capitaux, à ce genre de productions: il se fait donc un partage libre de ce superflu du travail; la part la plus considérable est toujours celle du consommateur, c’est l’accroissement d’aisance que la nation dérive du perfectionnement de son industrie et de l’augmentation de sa richesse. La part de ce superflu qui reste au producteur forme d’un autre côté le revenu national.

[Translation]

   This surplus can be evaluated either in itself or in comparison to the revenue it produces, and these two evaluations are wide different. In itself, it is equal to the difference between the labour which the same production would have cost a man had it not been for the help of accumulation of previous labour of his fellow-creatures on one hand, and the labour which it has really cost a productive labourer on the other hand. This, in fact, is the quantity by which the improvement of labour enriches the society. But, in comparison to the revenue it produces, it is not necessary to estimate the surplus likewise, because there would be no consumer who makes a demand for so enormous labour, or who consents to the replacement as if it had been really performed. It would never be demanded, for example, that the consumer should manufacture pins for himself, if the purchaser should give in exchange for them the fruits of as enormous labour as what would be necessary for a savage to make them. It is therefore necessary that this surplus should be divided between consumers and producers; that the latter offer to the former a sufficiently great advantage to engage them in carrying on the fruits of their industry, and that the former give the latter a sufficiently great benefit to engage them in effectively applying their industry and the accumulation of their capital to this sort of production. Therefore, this surplus of labour is freely divided. The most part of it always belongs to consumers, a fact which means the advancement of comfort the nation derive from the improvement of its industry and the increase of its wealth. The part of this surplus which remains in the hand of producers forms the national revenue, on the other hand.

Wednesday 29 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 278]

   Nous devons nous rappeler que le travail de l’homme, avant sa civilisation et l’accumulation de la richesse nationale, ne produisoit [produisait] que tout juste de quoi pourvoir à sa subsistance; mais qu’à mesure qu’un capital plus considérable l’a fourni de meilleurs outils, qu’un marché plus étendu s’ouvrant devant lui, de nouveaux capitaux l’ont mis en état de diviser et subdiviser les professions, il a fait toujours plus d’ouvrage comparativement à celui que ses seules forces physiques l’auroient [auraient] mis à portée de faire, avant l’accumulation des capitaux. Il existe donc un superflu de production par delà le remboursement du salaire nécessaire dé l’ouvrier auquel elle est due.

[Translation]

   We must remind ourselves that labour of man used to produce only what barely afforded him subsistence before human civilisation and accumulation of the national wealth; but that, as more capital provided better tools, as a more extensive market was opened to him, and as new capitals enable him to divide and subdivide professions, man always made more work in comparison to what his physical powers alone would have enable him to do before accumulation of capital. There exists, therefore, a surplus of production over the replacement of the necessary wages of the labourers to which we owe it.

Tuesday 28 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 08

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 277-78]

   Lorsque le salaire payé est réglé au taux moyen de ceux que l’on paye dans le même tem[p]s et le même lieu, que le profit et la rente sont évalués de même, et que tant le travail que le capital, ont été employés d’une manière aussi industrieuse et aussi avantageuse, qu’on pratique communément dans un tem[p]s et un lieu donné; le prix de la matière première, fixé d’après ces trois bases, est aussi bas qu’il puisse être; il ne peut être porté plus bas sans perte pour les producteurs et les entrepreneurs, et par conséquent sans que ceux-ci se dégoûtent et quittent le travail. Nous appellerons prix nécessaire celui d’une matière première qui n’excédera pas cette proportion: étant le plus bas possible, il n’occasionne aucune perte à l’acheteur, et procure cependant aux producteurs les trois espèces de revenus; un profit, une rente, et un salaire superflu. Il est très important de se convaincre que ces trois revenus peuvent exister, sans occasionner aucune perte à ceux qui les payent.

[Translation]

   When wages particularly paid are regulated to the mean rate of those generally paid at the same time and place, when the profit and rent are determined in the same manner, and when labour as well as capital has been employed in such an industrious and advantageous way as people generally carry it on at a given time and place, the price of raw materials, determined according to these three bases, is as low as can. It cannot be made lower without loss for the producer and entrepreneur and, in consequence, without discouraging them from continuing the business. We will call that price of raw materials not beyond this proportion necessary price. Being the lowest possible, it does not cause any loss to the purchaser, and still procures the three sorts of revenue, profit, rent and surplus wage, for the producer. It is very important to recognise that these three sorts of revenue can exist without causing any loss to those who pay for them.

Monday 27 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 07

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 276-77]

   Toute matière première que l’homme possède, soit qu’il l’ait recueillie sur la surface de la terre, soit qu’il l’ait arrachée de son sein, ou de celui des eaux, comprend réellement en soi, 1.° Le salaire tant nécessaire que superflu des ouvriers qui l’ont produite, ou appropriée à l’usage de l’homme, tel que l’entrepreneur le leur a payé. 2.° La rente des capitaux fixes employés à sa production, et qui ont aidé par leur accumulation le travail de l’ouvrier. Le rapport de cette rente au capital qui la produit, est déterminé par le rapport moyen entre le profit du commerce et le capital circulant: le capitaliste n’ayant aucun intérêt à faire circuler son capital, plutôt qu’à le fixer, ou vice versa, choisit entre ces deux emplois celui qui lui rapporte le profit le plus considérable; or la concurrence libre entre, tous les capitalistes, doit nécessairement produire l’équilibre entre les profits de tous les capitaux. 3.° Le profit que l’entrepreneur doit faire, proportionnellement à la masse de richesse mobiliaire [mobilière] qu’il a avancée aux journaliers, et à la durée de cette avance. Le rapport entre ce profit, et le capital sur lequel il est pris, est fixé dans un tem[p]s donné par la concurrence: les capitalistes n’étant pas plus attachés à un genre de production qu’à un autres, se portent vers celui qui rend davantage, et rétablissent l’équilibre, ainsi que nous l’avons vu au livre précédent, en parlant du profit moyen.

[Translation]

   All raw materials in the possession of man, whether from the surface of the earth, or from under it or the waters, are really composed of the following. The first of all is the necessary and surplus wages of labourers who have produced them or have appropriated them for human use, for entrepreneurs to pay them wages. The second is the rent of fixed capital which is employed in their production and the accumulation of which has helped the labourers to perform works. The relation of this rent to the capital which bears it is determined by the mean relation between the profit of commerce and the circulating capital. The capitalist, taking no more interest in keeping his capital circulating than in fixing it, or vice versa, chooses either of these two employments according to the higher profit alone. The free competition among all the capitalists should of necessity produce the equilibrium among the profits of all the capitals. The third is the profit which the entrepreneur should gain, in proportion to the amount of movable wealth he has advanced to day labourers, and to the term of this advance. The relation between this profit and the capital bearing it is determined by the competition at a given time. Capitalists, no more attached to one sort of production than another sort, carry on more profitable one, and recover the equilibrium, as we have seen in that part of the previous book concerning equalisation of profit.

Sunday 26 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 06

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 275]

   C’est dans les matières premières, qu’il faut chercher la valeur originale des choses manufacturées, avant que de la suivre au travers des différentes gradations par lesquelles elle s’élève; or les productions de la nature sont toujours la matière première de toute possession de l’homme: leur valeur est également née de son travail, mais sans l’aide de la nature, ce travail eût été impossible.

[Translation]

   It is in raw materials that you must find the original value of manufactured things, before trying to find it in a variety of labour by which it is raised. The produce of nature is always the first materials available of all the possessions of man. Their value has also come from human labour, but with no help of nature this labour would have been impossible.

Saturday 25 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 05

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 275]

   Quel doit être le prix du vendeur lorsqu’il propose un échange? certainement il n’est pas arbitraire, et doit dépendre d’une certaine valeur intrinsèque de la chose qu’il offre de céder. Nous avons dit que c’est au travail des hommes, que nous devons toutes les choses auxquelles nous reconnoissons [reconnaissons] quelque valeur; en suivant depuis sa création celle dont nous cherchons le prix, nous verrons en effet à quel travail elle est due, et contre quel travail exigible, on peut à bon droit l’échanger.

[Translation]

   What should be the price of the seller when he offers an exchange? Certainly it is not arbitrary, and should depend upon certain intrinsic value of the thing he offers to give over. We have argued that it is to human labour that we owe all the things in which we find some value. By tracing that thing whose price we search for from its creation onwards, we can indeed see to what labour we owe it, and for what due labour we can justly exchange it.

Friday 24 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 04

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 274-75]

   Depuis que l’introduction du numéraire dans les échanges, lui a donné une valeur à peu près uniforme dans le monde commerçant, on le choisit en général pour terme de comparaison. Nous examinerons dans le chapitre suivant les avantages et les inconvénien[t]s de cette comparaison, mais dans celui-ci nous en profiterons pour reconnoître [reconnaître] les points fixes d’où l’on part peur déterminer chaque prix.

[Translation]

   Since the introduction of specie into exchanges gave it almost universal value in the commercial world, it has been generally chosen as term of comparison. In the following chapter we will examine advantages and inconveniences of this comparison, but in this chapter we will make use of specie to set the fixed points according to which each price is determined.

Thursday 23 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraphs 02-03

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 274]

   Dans ce second livre nous examinerons quelle est l’origine des différen[t]s prix de chaque chose; comment on peut les évaluer de deux manières, en les comparant au numéraire ou an travail; quels ils doivent être pour l’avantage de la nation; comment enfin la loi influe sur les prix, soit par des règlemen[t]s financiers dont le but est d’accroître les revenus du Gouvernement, soit par des dispositions générales, dictées par quelque système, et destinées à accroître la richesse de toute la nation.
   Le prix est en général la quantité d’une espèce de richesses, à laquelle on estime qu’une autre espèce de richesses est égale.

[Translation]

   In the second book we will examine what is the origin of different prices of each thing; how one can measure them in two ways, in terms of money or of labour; what prices should be to the advantage of the nation; finally, how laws influences prices, either by financial regulations whose purpose is to increase the revenue of the government, or by general measures, directed by some system and destined for increase of the wealth of the whole nation.
   In general, the price is the quantity of a sort of wealth to which another sort of wealth is estimated to be equal.

Wednesday 22 July 2009

Book 2, chapter 1, paragraph 01

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 273-4]

Après la formation et la progression des capitaux, la partie de l’économie politique qui paroît [paraît] exiger de la part du Législateur du commerce les connoissances [connaissances] les plus approfondies, c’est celle qui enseigne à distinguer l’origine du prix des choses, et les causes qui le déterminent. D’une part en effet, le prix comme base de tous les échanges auxquels on doit l’accumulation de la richesse nationale, influe singulièrement sur le résultat de ces échangés, de l’autre le Législateur peut, même sans le vouloir, altérer les prix de différentes manières, mais presque toujours au désavantage de la société.

[Translation]

The part of political economy which the legislator of commerce seems supposed to recognise the second most thoroughly, to the formation and progression of capitals, is to teach us to distinguish between the origin of the price of things and the cause of price determination. Indeed, the price, as the base of all exchanges to which we owe the accumulation of the national wealth, exerts a unique influence upon the result of these exchanges on one hand, and the legislator can change the prices in diverse ways, only to do the society some harm in the most cases, even unintentionally, on the other hand.

Tuesday 21 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 21

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 271-72]

   On a, il est vrai, des données un peu plus exactes pour calculer la consommation annuelle, ainsi selon qu’on estime que l’un compensant l’autre, celle de chaque individu françois [français], arrive à 200 ou à 300 francs, one doit conclure que celle de toute la nation est de six ou de neuf milliards par an; avant cependant que d’établir sur ce premier apperçu [aperçu] un rapport entre le montant de sa consommation et la valeur de son mobilier, il reste à savoir d’une part, si comme il est probable, elle n’en doit pas une partie; de l’autre, si elle dispose en même tem[p]s du produit d’une, de deux, ou de plusieurs années. Quand on veut calculer la richesse de l’Angleterre, on est bien plus embarrassé encore; en effet la seule chose que l’on voie clairement, c’est qu’elle dispose en même tems du produit brut d’un plus grand nombre d’années que la France; du reste on ne trouve plus aucun rapport entre sa consommation et sa richesse, parce que faisant à elle seule le commerce de l’Univers presqu’entier, et mettant ses capitaux au service de toutes les autres nations, leur influence sur l’aisance nationale n’est point en raison de leur valeur totale, mais seulement en raison des profits qu’ils rapportent à leurs maîtres. Aussi tout ce que nous osons avancer sur le capital circulant, c’est que cela de la France, proportionnellement à ses besoins, est infiniment moins considérable que celui de l’Angleterre, quoiqu’il dépasse de beaucoup, même aujourd’hui, les limites qu’on lui avoit [avait] assignées dans le tem[p]s de la plus grande prospérité du commerce françois [français], lorsque ne reconnoissant [reconnaissant] d’autre capital que le numéraire, on l’évaluoit [évaluait] à un, ou tout au plus à deux milliards de livres.

[Translation]

   It is true that you have some data a little more exact for calculation of annual consumption. According to the estimation that a French individual consumes averagely 200 to 300 francs, one must conclude that the consumption of the whole nation is from 6 to 9 billions a year. But, before determining at first sight a relation between the sum of its consumption and the value of its movable, you have yet to know whether or not the nation owes a part of its consumption, as is often the case, on one hand, and whether it simultaneously has at its disposal some of the produce of one, two, or several years, on the other hand. When you want to calculate the wealth of England, you are in still more trouble. In fact, all you can see clearly is that England has gross produce of more years at its disposal at the same time than France. You do not find any other relation between its consumption and its wealth, because, as England carries on trade with almost all parts of the universe by itself alone, and puts its capitals at the service of all other nations, the influence of its capitals upon the national comfort is not proportional to their total value, but only to the profits they bear to their masters. Thus all we dare to assert regarding the circulating capital is that that of France in comparison to its needs is far less enormous that that of England, though it far surpasses the limits even today, which you had assigned to it at the time of the greatest prosperity of French commerce, when, no other capital than specie recognised, it was evaluated at one or, at most, two billion livres.

Monday 20 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 20

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 269-70]

   On ne peut partir avec lui du produit brut de la terre pour calculer la valeur totale de la richesse mobiliaire [mobilière], qu’autant qu’on convient avec les économistes, que le travail ne fait que changer la forme de ce produit sans ajouter à sa valeur; mais nous au contraire, en développant les principes d’Adam Smith, nous avons reconnu que dans le prix des marchandises se trouvent confondus, non-seulement le salaire nécessaire qui représente à lui seul le produit brut consommé par ceux qui les ont manufacturées, mais encore le salaire superflu, le profit et la rente, qui en augmentent considérablement la valeur: nous avons eu lieu de nous assurer qu’une nation prospérante ne consomme pas si vite, qu’elle produit, et qu’elle dispose en même tem[p]s de la récolte et du fruit des travaux de plusieurs années; nous avons vu que les productions peu altérées par les arts, doivent elles-mêmes nécessairement être accumulées, puisque le marchand de blé, par exemple, doit remplacer le capital du fermier par un capital égal ou à peu près à toute la valeur de sa récolte, afin que celui-ci puisse recommencer ses semailles et ses travaux; et que si le fermier lui-même est marchand de blé, il lui faut deux capitaux, l’un pour attendre l’acheteur, et l’autre pour continuer son travail, en sorte qu’on doit doubler le produit brut, afin d’avoir le capital que l’agriculture fait circuler dans chaque pays. Quant aux produits des manufactures, la nation possède souvent en même tem[p]s ceux de quatre ou cinq années, et parmi ceux-là, il en est dont la valeur est décuple, comme les étoffes de laine ou de coton; ou centuple, comme les marchandises de Sheffield et de Birmingham, de celle de la matière première, que Mr. Garnier prend pour base de son évaluation.

[Translation]

   Following him, you can begin with the gross produce of land in order to calculate the total value of movable wealth, but only as log as you agree with the economists, that labour only transforms this produce without adding to its value. But, on the contrary, developing the principles of Adam Smith, we have recognised that the price of commodities does not only include the necessary wages (which in his eyes represent only the gross produce consumed by those who have manufactured them), but also the surplus wages, profits and rent, which add much to the value of the produce. We have had every reason to assure ourselves that a prosperous nation does not consume as soon as it produces, and that the nation has at its disposal the harvest and the fruitage of labour of several years. We have seen that the produce little changed by arts should itself be accumulated necessarily, because a corn merchant, for example, should replace the capital of a farmer by a capital of little or no more value than his harvest, in order that the farmer may restart sowing and labouring. Moreover, if the farmer himself is a corn merchant, he must have two capitals, one of which is for waiting for purchase, and the other for continuation of his labour. Consequently you should double the gross produce, in order to have the capital circulating in agriculture in each country. As for the produce of manufactures, the nation often possesses that of 4 or 5 years at the same time, and there is a part of this produce whose value is ten times as much, such as wool or cotton drapery, and there is another part whose value is a hundred times as much, such as commodities from Sheffield and Birmingham, as that of the raw materials. Mr Garnier makes an evaluation on the basis of these commodities.

Sunday 19 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 19

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 268-69]

   Je sens que pour satisfaire pleinement les lecteurs françois [français], il faudroit [faudrait] en terminant ce livre sur les capitaux, leur présenter quelque apperçu [aperçu] sur la valeur de ceux de leur patrie, mais je ne connois [connais] aucune base sur laquelle on puisse s’appuyer pour apporter à un pareil calcul la moindre exactitude. Ce n’est pas que le nouveau traducteur d’Adam Smith et le chef de son école en France Mr. Garnier n’ait tenté dans son intéressante préface de tracer un parallèle entre la richesse de la France et celle de l’Angleterre, mais loin que son exemple m’inspire la hardiesse de l’imiter, je me crois obligé de contester les principes sur lesquels il se fonde, parce qu’une seule erreur dans ses écrits, venant d’un esprit judicieux et d’un écrivain respecté, a bien une autre importance que tous les faux calculs de ceux qui, écrivant sans réfléchir, dogmatisent sans convaincre.

[Translation]

   I think that, in order to fully satisfy French readers, it would be necessary to conclude this book on capital by presenting to them some insight concerning the value of the capital of their country, but I understand nothing upon which you can rest to bring the less exactness to such a calculation. Not that the new translator of Adam Smith and the master of his school in France, Mr Garnier, has never tried to trace a contrast between the wealth of France and that of England in his interesting preface, but, his example far from inspiring me to imitate him boldly, I feel obliged to contest the principles upon which he rests, because even one error in his writings, coming from a sensible mind and a respected writer, is of wide different importance from all the false calculations of those who write without reflection and dogmatise without persuasiveness.

Saturday 18 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 18

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 267-68]

   Un pareil commerce peut, comme tout autre, être avantageux aux deux nations, qui le font; il ne l’est pour la nation prêteuse qu’autant qu’elle a une surabondance de capitaux, et qu’elle peut en prêter une partie à long terme, ou à perpétuité; il l’est toujours et dans tous les cas pour la nation emprunteuse. Le vendeur de chaque nation ne prend sur la vente que le profit accoutumé, et la marchandise qui ne pouvoit [pouvait] parvenir au consommateur que par le mouvement simultané de plusieurs capitaux, n’est surchargée que des profits qu’elle doit légitimement payer, en sorte qu’elle lui revient à son prix naturel. Il gagne donc aussi bien que les deux marchands à ce commerce, car la marchandise lui revient à meilleur compte que si elle étoit [était] faite dans son pays: s’il en étoit [était] autrement, il s’y établiroit [établirait] bientôt des manufactures, qui feroient [feraient] tomber le commerce étranger. C’est ainsi que quand on laisse le commerce libre, les capitaux prennent naturellement la direction la plus avantageuse à la nation qui les possède, et qu’après l’avoir servie, ils sont encore utiles à toutes celles qui ont des relations avec elle. La direction des capitaux chez elle est comme on vient de voir, dans les commencemen[t]s du dehors au dedans; les nations étrangères lui prêtent presque sans le savoir ceux qui sont nécessaires pour ranimer son industrie; mais lorsque celle-ci augmente, le premier mouvement des capitaux s’arrête, le commerce en est saturé, bientôt ils prennent la direction contraire, et plus la prospérité s’accroît, plus rapidement ils marchent du dedans au dehors.

[Translation]

   Such a sort of trade can, as any other, be advantageous to the two nations engaged in it. It is only advantageous to the nation in credit as long as it has an overabundance of capital and can lend a part of it on long term or in perpetuity. It is advantageous to the nation in debt on every occasion and in every case. Salesmen of each nation take only usual profits upon sales, and the commodities which could reach the consumer only by simultaneous flow of several capitals are loaded only with so moderate profits they must legitimately bear, that the commodities present themselves to the consumer at their natural price. Therefore, the consumer gains in the same way as the two merchants in this trade, because the commodities present themselves to him at a lower price than if they were made in his home country. If they were not, some mills of manufactures would be soon established, which would put foreign trade in decline. Thus, with trade free, capitals naturally take the most advantageous course for the nation which possesses them, and they are also useful to all other nations which are somewhat related to the nation, after having served it. The course of capitals in this country is, as we have seen, from abroad to home at the beginning. Foreign nations supply loans to it, hardly knowing what are necessary to animate its industry. But, when the industry has grown, the first flow of capitals comes to a halt; the commerce is full of capitals, which take the contrary course; the more prosperity the country is in, the more rapidly they flow abroad from home.

Friday 17 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 17

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 266]

   Le même commerce que les Anglois [Anglais] font avec les François [Français], les Genevois l’ont fait pendant long-tem[p]s avec les bijoutiers du royaume de Naples; l’effronterie de ces derniers qui ne consentoient [consentaient] jamais à payer le premier envoi qu’ils ne tinssent entre leurs mains le second, ne laissoit [laissait] point de doutes sur la manière dont ils se procuroient [procuraient] des fonds; aussi les marchands horlogers qui vouloient [voulaient] retirer les leurs de ce pays-là, étoient-ils [étaient-ils] obligés d’user de supercherie, et d’accepter des commissions qu’ils n’avoient [avaient] point dessein de remplir.

[Translation]

   The Genevan carried on the same sort of trade as the English people do with the French, with jewellers in the kingdom of Naples for a long time. The impudence of the jewellers, who did not consent to pay for the first cargo when they did not hold the second in hand, left no doubt on the way in which they made money. Therefore, merchants of watches who wanted to bring theirs from Naples were obliged to practice deception, and to receive commissions they did not plan to fulfil.

Thursday 16 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 16

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 264-66]

   Un François [Français] qui n’a absolument point de fonds, s’il peut obtenir du crédit chez les fabrican[t]s et les banquiers anglois [anglais], n’hésite pas à entreprendre le commerce de marchandises angloises [anglaises]: il achète dans le courant de l’année pour 10,000 sterl. payable dans quatre ou six mois, et il paye chaque envoi l’un après l’autre à l’échéance par une traite sur son banquier de Londrès; celui-ci lui fait crédit pour un tem[p]s au moins aussi long; le François [Français], à mesure qu’il fait de l’argent avec sa marchandise, envoie des remises au banquier, mais en même tem[p]s il tire de nouveau sur lui, et donne de nouvelles commissions au fabricant, en sorte que, quoiqu’il paroisse [paraisse] payer régulièrement, il peut cependant négocier toute sa vie, sans avoir d’autre capital que ce premier emprunt fait pour un an. La régularité de ses payemen[t]s augmentera son crédit, il pourra quitter ses premiers marchands pour s’adresser à d’autres, et sera sûr d’en être écouté. Les profits de son commerce se proportionneront toujours à ce capital qui n’est point à lui, et qu’il pare ne posséder que pour un an, tandis que dans le fait le premier envoi est un prêt fait à perpétuité, qu’il ne remboursera que lorsqu’il renoncera au commerce, et qu’il a réellement payé comptant tous les envois subséquen[t]s. Ses profits ne seront pas le seul avantage qu’en retirera la nation, elle sera effectivement enrichie de 10,000 liv. sterling, qu’elle possédera en marchandises de plus qu’auparavant; ces marchandises ne seront données au consommateur que contre une valeur réelle; et comme, à proprement parler, c’est seulement le second envoi de l’Anglois [Anglais] qui est payé, et que le premier ne l’est jamais, la valeur de ce premier forme indépendamment du profit du négociant, un capital de 10,000 liv. sterl. qui, entre les mains d’un commerçant françois [français] est nécessairement employé à mettre en activité une industrie françoise [française], avec laquelle il puisse payer l’Anglois [Anglais].

[Translation]

   If a Frenchman has no stock at all but can obtain some credit from English manufacturers and bankers, he does not hesitate to trade in English commodities. In the course of the year, he makes a purchase for 10,000 sterling payable in 4 or 6 months, and he pays for each cargo one by one at the due date by drawing a bill upon his banker in London. The banker gives him credit at least on as long term. The Frenchman, every time he makes money with his commodities, sends some commissions to the banker, but at the same time he draws another bill upon the banker, and gives new commissions to manufacturers. Accordingly, he can trade forever with no other capital in hand than the first loan made for one year though he appears to pay regularly. The regularity of his payments will increase his credit, and he will be allowed to break away with the first merchants for applying for other merchants, and will be sure of making his point. The profits of his trade are always proportional to that capital which is not in his hands but which he appears to possess only in a year. On the other hand, the first cargo is, in fact, a loan made in perpetuity, which will not be redeemed until he quits the commerce, and he has really paid in cash for all the subsequent cargos. His profits will not be the only advantage that the nation will reap from that, and the nation will be effectively enriched by 10,000 pounds sterling; it will possess 10,000 pounds sterling in kind, and will be the richer than before. His commodities will be given to consumers only for something of real value. Properly speaking, since only the second cargo of the Englishman is paid for, and since the first one is never paid for, the value of this first one forms a capital of 10,000 pounds sterling independently from the profit of the merchant, a capital which, in the hands of a French merchant, is necessarily employed to activate a branch of French industry, with which he can pay the Englishman.

Wednesday 15 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 15

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 263-64]

   Revenons cependant à l’accroissement progressif des capitaux; l’on sent que leur marche, lorsqu’ils vont chercher un emploi plus profitable dans un autre pays, doit altérer la balance des importations et exportations. La nation qui entreprend un commerce étranger qu’elle n’avoit [avait] pas auparavant devient prêteuse, et pour solder la balance, elle reçoit en échange d’un capital qui surabonde chez elle, non pas des marchandises d’égale valeur; mais des créances. Lorsqu’elle entreprend le commerce du dedans au dehors, elle prête une fois pour toutes la valeur de ses exportations; ce n’est pas qu’au bout de l’année on ne lui en paye le montant, mais à la même époque elle a déjà fait un second envoi aussi considérable que le premier, en sorte qu’elle est toujours à découvert pour la même somme vis-à-vis de la nation étrangère avec laquelle elle trafique. C’est ainsi que l’Angleterre est créancière de la France pour toute la valeur de ses exportations annuelles, qu’elle fait passer en contrebande des capitaux destinés à mettre en activité le commerce de sa rivale, et que dans cette lutte singulière, les Anglois [Anglais] trouvent leur intérêt à nous faire du bien malgré nous, tandis que nous employons toutes nos forces pour les en empêcher.

[Translation]

   But let us return to the progressive growth of capitals. It is thought that the course of capitals should alter the balance of imports and exports, because they search for more profitable employment in another country. The nation which undertakes a branch of foreign trade it did not carry on before becomes a creditor, and, to settle the balance, it does not only receive commodities of the same value but bills of credit, in exchange for the capital of which it has an overabundance. When the nation undertakes the exporting trade, it lends the value of its exports once and for all. It is not that at the end of the year the nation is paid in one lump sum, but by this time it have already shipped the second cargo as massive as the first, so that the nation is always credited with the same sum to the nation with whom it trades. It is thus that England is a creditor to France for all the value of annual exports, that England illegally exports capitals only to activate the commerce of its rival, and that in this singular rivalry the English people find their interest in doing us good against our will, while we put all our energies into stopping capitals from coming in from England.

Tuesday 14 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 14

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 261-63]

   Nous supposons toujours une société dont les capitaux sans cesse accrus par l’économie, remplissent bientôt tous les canaux dans lesquels ils coulent. L’agriculture, les manufactures, le commerce intérieur, et celui d’exportation, en ont retenu tout ce qu’ils en peuvent occuper; il en reste d’autres encore; certainement leurs propriétaires ne les laisseront pas oisifs: ils feront des commandites aux marchands étrangers, des prêts aux propriétaires, et aux chefs de manufactures des pays les plus éloignés, ils se présenteront pour tous les emprunts que feront tous les Gouvernemen[t]s du monde, eux-mêmes enfin ils entreprendront le commerce de transport de toutes les autres nations, ils approvisionneront les unes aux dépens des autres, et devenus les courtiers de l’univers, ils mettront leurs capitaux au service de tout le monde; leur pays n’en retirera que le profit, tandis que l’usage en sera cédé en entier à des étrangers. Les Hollandois [Hollandais] étoient [étaient] parvenus à ce faîte de prospérité, ainsi que quelques peuples plus petits, et dont l’histoire est moins brillante, tels que les Genevois, les Neuchâtelois, les Bâlois: la révolution a englouti les capitaux des uns et des autres; mais s’ils avoient [avaient] continué à multiplier, ils auroient [auraient] constamment trouvé de l’emploi, et procuré du profit à leurs maîtres; car les bénéfices des capitalistes ne devroient [devraient] s’arrêter, que lorsque la totalité de la surface du globe auroit [aurait] été portée au plus haut point de culture dont elle soit susceptible, que ses produits auroient [auraient] reçu du travail de l’homme tout le perfectionnement qu’ils peuvent en recevoir, et que la population pour les consommer seroit [serait] arrivée au point le plus élevé où elle puisse parvenir. Jusqu’alors il y aurait toujours quelque part du profit à faire en faisant du bien, et les capitaux qui non plus que les capitalistes ne sont point enchaînés an pays qui les a vu naître, iroient [iraient] constamment chercher l’avantage du public et le leur, jusquà ce que ce bien fût opéré: or, comme cette prospérité de la terre entière ne pourvoit se soutenir que par la paix de tout l’univers, l’abolition de l’ignorance et de la barbarie, et celle de tous les mauvais Gouvernemen[t]s du monde, elle est bien plus reculée dans le pays des chimères que la paix universelle de l’abbé de St. Pierre. Aussi long-tem[p]s qu’il y aura des despotes sur cette terre pour détruire le fruit des, efforts des capitalistes, on ne doit point craindre qu’à force de faire le bien, ceux-ci n’en trouvent plus à faire.

[Translation]

   We consistently suppose a society in which capitals, gradually growing due to economy, soon fill all the channels through which they flow. Agriculture, manufactures, inland trade, and exporting trade, above all, have provided all capitals can flow into. But capitals go somewhere else. No doubt their owners will not leave them unemployed. They will invest their capitals to foreign merchants, and will supply loans to landlords and master manufacturers in the furthest countries; they will subscribe all loans all the governments all over the world will make; and finally they will themselves undertake the commerce of transport of all other nations. They will accommodate one another, will become intermediaries of the universe, and will put their capitals at the service of the world. Their country will reap only the profit from their capitals, while the entire use of their capitals will be given up to foreign countries. The Hollanders had reached the peak of prosperity, like some other nations who are smaller and whose history is less honourable, such as those of Geneva, Neuchâtel, and Basel. The revolution swallowed up the capitals of the former as well as the latter. But they would constantly have found one or another sort of employment and procured some profit for their masters had they kept on growing. It is because profits of capitalists would not cease to come about until the whole surface of the globe has been carried into cultivation to the highest degree possible, until its produce receives all the possible improvements from human labour, and until the population to consume it has arrived to the highest point possible. Until then there would always be some profit to reap by making better use of them, and the capitals which are free from the country where they were born, as well as capitalists, would constantly search for the public and for their own advantage until this good is realised. But, since this prosperity on the whole earth could last only due to the peace of all the universe, due to the eradication of ignorance and barbarism, and due to the abolition of all evil governments of the world, it is much less feasible in the country of illusions than the universal peace of Saint-Pierre. As long as the earth has such despotic rulers as destroy the fruitage of efforts of capitalists, one should not fear that capitalists should find nothing to do by means of making better use of capitals.

Monday 13 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 13

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 260-61]

   Lorsque les capitaux d’une nation occupent tous ses ouvriers, remplissent tous les canaux de son industrie, de son agriculture, de son commerce intérieur, et qu’il en surabonde encore, les capitalistes qui ne peuvent les laisser oisifs sans perdre leurs revenus, cherchent à employer utilement le surplus au dehors. Dans les commencemen[t]s de la prospérité croissante de la nation dont nous suivons les développemen[t]s, les marchands étrangers apportoient [apportaient] dans ses marchés les productions étrangères dont elle avoit [avait] besoin, et y prenoient [prenaient] en échange celles qu’elle destinoit [destinait] l’exportation. Le capital de ces marchands en remplaçant celui du producteur national, redoubloit [redoublait] son activité; mais bientôt les capitalistes nationaux, ne trouvant plus assez d’occupation à l’intérieur, veulent partager le profit des importateurs; au lieu d’attendre chez eux les marchandises de l’Amérique ou de l’Inde, ils les vont chercher dans les contrées qui les produisent et y portent les leurs en échange. Placés plus avantageusement qu’aucun étranger pour acheter et vendre dans leurs propres marchés, si leur capital suffit pour faire tout leur commerce d’exportation, ils sont assurés de l’attirer à eux tout entier.

[Translation]

   When the capitals of a nation occupy all its labourers, fill all the channels of industry, agriculture, and inland trade and when it is overabundant with them, capitalists, who cannot leave them unemployed without losing their revenue, attempt to usefully employ the overabundance abroad. At the beginning of the growth of the national prosperity (whose developments we follow), foreign merchants carried into the markets the foreign produce the nation wanted, and took for exchange that which it appropriated for exportation. The capital of these merchants stimulated the activity of national producers by supplementing that of them. But the national capitalists, soon finding no longer enough opportunity at home, want to divide the profit of imports. Instead of waiting for commodities to come from America or India, they will try to find the same sorts of commodities in countries which produce them and carry back their produce in exchange. In a more advantageous position than any foreigner for purchase and sale in their own markets, if their capital is sufficient for all their commerce of exportation, they are sure that all the commodities will flow in.

Sunday 12 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 12

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 259]

   Quelqu’accroissement que prenne la richesse nationale, elle n’élèvera jamais les salaires des ouvriers jusqu’au point de ne plus laisser d’avantage à ceux qui les feroient [feraient] travailler. Dès l’instant qu’enhardis par la concurrence entre les entrepreneurs de manufactures, les ouvriers formeroient [formeraient] la prétention déraisonnable de priver les capitalistes de tout ou de presque tout profit sur leurs ouvrages, ceux-ci destineroient [destineraient] une assez grande masse de capitaux au commerce étranger, pour laisser un vide dans leur pays, et pour que les journaliers privés d’ouvrage fussent obligés de rabattre de leurs demandes. D’autre part ces ouvriers, pourvu que le commerce et les manufactures soient libres, supposition d’après laquelle nous partons toujours, seront constamment assurés, si leur pays est riche, d’y retenir en modérant leurs demandes, une masse de capitaux suffisante pour animer leur industrie.

[Translation]

   However huge the national wealth may become, it will never raise the wages of labourers to the point where there remains no advantage in the hands of those who would employ them. If labourers made an absurd demand to leave capitalists with little or no profit upon their works, presuming on competition among entrepreneurs of manufactures, the capitalists would immediately appropriate a sufficiently large amount of capital to foreign trade, leaving some room in their country, and forcing the unemployed day labourers to drop their demand. On the other hand, as long as trade and manufactures are free, an assumption accroding to which we always start, those labourers will be constantly sure of keeping home an amount of capital enough to animate their industry by dropping their demands, if their country is rich.

Saturday 11 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 11

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 258-59]

   Le bas prix de la main d’œuvre permet donc toujours aux pays pauvres de vendre certaines productions à meilleur marché que les pays riches; aussi l’Angleterre, la nation la plus riche de l’Europe, a-t-elle toujours besoin de celles qui ont moins de capitaux qu’elle, non-seulement pour les productions qui ne sont pas propres à son climat, mais encore pour celles dont le prix est surtout composé de main d’œuvre; tandis qu’elle peut vendre meilleur marché que toute autre nation celles dont le prix est surtout composé de profit; elle tire des dentelles et des toiles de la France et de l’Allemagne, de la bonnéterie [bonneterie] de l’Ecosse, et elle distribue des étoffes, de la quincaillerie et des marchandises qu’elle a importées des Indes, et non ouvré elle-même, à tout l’Occident.

[Translation]

   The low price of labouring hands, therefore, always permits poor countries to sell certain commodities at a lower price than rich countries. Thus, England, the richest nation in Europe, always needs those countries which have less capital than it, not only for the produce unsuitable for its climate but also for that whose price is composed almost of that of labouring hands. On the other hand, England can sell that whose price is composed almost of profit, at a lower price than any other nation. It imports lace and cloth from France and Germany and knitted fabrics from Switzerland, and distributes all over the West cloth, hardware, and commodities imported from India, without processing them for itself.

Friday 10 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 10

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 256-58]

   Cet accroissement des capitaux qui est presque toujours la cause première de l’établissement d’une nouvelle manufacture, et du bon marché de ses productions, a cependant sur quelques autres l’effet tout contraire, celui de les faire fermer, ce sont telles dans le prix desquelles le salaire entre pour une plus grande part que le profit: car plus les capitaux abondent, et plus luttant les uns contre les autres pour attirer les ouvriers, ils doivent renchérir leurs journées. L’on ne petit rien souhaiter de plus heureux pour une nation qu’une lutte semblable; puisque son résultat est l’aisance universelle, celle sur-tout [surtout] des hommes qui ne vivent que du travail de leurs mains. Il y a certaines manufactures qu’un très petit capital suffit pour mettre en mouvement, parce que la matière première est de peu de valeur, et qu’elle en acquiert une très considérable, par le travail d’un seul artisan. Le point de France et d’Alençon, la dentelle de Flandre et celle de Mirecourt sont des exemples de cette espèce de manufactures; les femmes qui les travaillent ne gagnoient [gagnaient] que 25 à 40 centimes par jour suivant leur habileté: si le salaire de ces femmes venoit [venait] à doubler, la manufacture ne pourroit [pourrait] probablement plus se soutenir, la diminution du profit d’un seul entrepreneur, ne pouvant suffire pour couvrir le doublement du salaire qui constitue les sept huitièmes du prix de cet ouvrage. Observons au reste que si ce doublement du prix du travail, provient de ce que les impôts ou toute autre cause ont doublé le prix des objets de première nécessité, ce n’est que la valeur nominale du salaire nécessaire qui a augmenté, tandis que sa valeur réelle est restée toujours la même, en sorte que l’aisance des faiseuses de dentelles ne s’est point accrue, et que le revenu de la classe ouvrière de la société n’est pas plus ample qu’auparavant: mais si les objets de première nécessité restant au même prix, les salaires sont deux fois plus élevés, l’augmentation de ceux-ci est le signe d’une plus grande recherche de travail. C’est dans ce cas que la chute de la manufacture de dentelles seroit [serait] une preuve de la prospérité nationale, puisqu’elle démontreroit [démontrerait] que les artisans gagnent deux fois plus par un autre travail, et que leur salaire superflu ou le revenu de la classe ouvrière est augmenté du double.

[Translation]

   The growth of capitals, which is almost always the first cause of the establishment of a new branch of manufactures, and of the low prices of its produce, has an utterly contrary effect upon some other branches. This is to destroy the branches where wage comprises a larger part of price than profit, because the more abundant capitals the more competitive each capital is for the purpose of attracting labourers, a circumstance which should raise their wages. You cannot wish more happiness for a nation than such a competition, because its result is universal opulence, above all, for those who live only by their own labour of hands. There are certainly some branches of manufactures a small capital suffices to set in motion, because raw materials are of little value and can be acquired in volume by means of labour of a single artisan. Needle lace (point de France, point d’Alançon) and bobbin lace (Flanders lace and Mirecourt lace) are examples of this sort of manufactures. Women who labour at these only gain 25 to 40 centimes a day according to their ability. If the wage of these women had been doubled, it is more probable, the mill could not be supported, and the diminution of profit of one entrepreneur could not be enough to cover that increase of wage which accounts for seven eighths of the price of that work. Besides, let us observe that, if the increase of the price of wage derives from the fact that taxation or any other cause has double the price of objects of the first necessity, it is only the nominal value of necessary wages that have increased, while their real value has always remained the same, so that the comfort of the women of lace has not increased, and that the revenue of the labouring class of society is no more enormous than before. But, if objects of the first necessity remain the same in price and the wages are twice as high as before, the increase of the wages is the sign of more refinement of labour. It is in this case that the fall of lace manufacture would be a proof of the national prosperity, because it would demonstrate that the artisans gain twice as high by performing another sort of labour, and that their surplus wage or the revenue of the labouring class has been doubled.

Thursday 9 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 252-56]

   Une manufacture qu’une nation ne pouvoit [pouvait] exercer devient accessible pour elle par plusieurs causes, lorsqu’elle s’enrichit: 1.° L’accroissement des capitaux fait baisser le taux de l’intérêt, le profit du commerce et par conséquent le prix des marchandises. Comment les François [Français], par exemple vendroient-ils [vendraient- ils] leurs étoffes de coton au même prix que les Anglois [Anglais]? les premiers veulent que leur capital leur rapporte le vingt pour cent par an, parce qu’ils pourroient [pourraient] le gagner dans tout autre commerce, et qu’ils payent souvent jusqu’à dix pour cent d’intérêt pour le dépôt qu’ils ont en mains; les Anglois [Anglais] se contentent de gagner huit pour cent, parce qu’au point de richesse où ils sont parvenus, c’est le taux moyen des profits du commerce: il faudroit [faudrait] donc pour que le fabricant François [Français] vendît au même prix que l’Anglois [Anglais], que sa marchandise lui revînt de douze pour cent meilleur marché qu’au dernier. Mais lorsque les richesses de la France seront augmentées, il lui suffira qu’elle revienne au même prix, pour que le François [Français] soit assuré que la sienne, qui n’est chargée d’aucuns frais de transport, exclura celle des Anglois [Anglais] de tous les marchés de son pays. 2.° Le taux élevé de l’intérêt et du profit mercantile n’affectent pas moins le prix de la matière première que celui de l’ouvrage achevé; ce profit est de la nature de l’impôt fameux d’Espagne nommé Alcavala, qui se répétoit [répétait] à chaque vente successive, il se multiplie par le nombre des marchands entre les mains desquels a dû passer la marchandise avant que d’être achevée. Une pièce de coton, par exemple, a dû payer double profit au commerçant de Marseille, qui a importé la matière première; autant au chef de la filature, au fabricant, et au marchand détailleur [?]; or chaque fois ce doublement s’est prélevé sur toute la somme. Quand le salaire des ouvriers devient plus élevé, le prix de leurs produits n’est accru qu’en raison du nombre de journées de travail auxquelles ce produit est dû: l’augmentation des profits élève le prix de l’ouvrage dans une proportion géométrique, et celle des salaires seulement dans une proportion arithmétique. 3.° Lorsque les capitaux commencent à se multiplier, les capitalistes trouvent moins de facilité à les employer; ils sont obligés de chercher des voies nouvelles pour les faire valoir, de surprendre le secret des fabrican[t]s étrangers, ou d’en découvrir de supérieurs aux leurs. Il s’établit donc une émulation d’industrie au profit du consommateur, qui tend toujours à tout produire à meilleur marché, et à perfectionner toutes les machines. 4.° Enfin la rapidité de l’exécution, et par conséquent son bon marché, dépendent en grande partie de la division du travail, de telle sorte que chaque ouvrier, ou chaque classe d’ouvriers, ne soie chargée que d’une seule opération la plus simple possible. Dans les villes où il n’y a qu’un capital peu considérable destiné à l’horlogerie, le même ouvrier fait toutes les parties d’une montre; à Genève où ce capital s’élève à cinq ou six millions, il se divise entre plusieurs marchands et fabrican[t]s, dont chacun se limite à une seule opération. Il seroit [serait] impossible d’établir ailleurs une fabrique d’horlogerie, qui travaillât aussi bon marché que celle de Genève, si l’on ne lui destinoit [destinait] en même tem[p]s un capital assez considérable, pour que divisé entre cinquante chefs d’atelier, il suffit à entretenir chacun d’eux toute l’année, en ne l’occupant que d’une seule des opérations de cette fabrique.

[Translation]

   A branch of manufactures a nation used to be unable to carry on becomes accessible for the nation for some reasons, when it is rich. First of all, the growth of capital lowers the rate of interest, the profit of commerce, and consequently the price of commodities. How would the French, for example, sell their cotton drapery at the same price as the English? The former want their capital to bear 20 percent a year, because they could gain it from any other sort of commerce and often pay the interest up to 10 percent for the deposit they have in hands. The English are content to gain 8 percent, because this is the mean rate of profits of commerce at the stage of wealth they have reached. It would therefore be necessary that the drapery should cost the French 12 percent [point] less than the English, for the French manufacturers to sell at the same price as the English. But, when the wealth of France has increased, it will be sufficient if only the drapery should cost the same, because the French are assured that their drapery, to transport which it costs nothing, will exclude that of the English from all the markets in France. Secondly, the high rate of interest and of mercantile profit affects the price of raw materials as well as that of finished goods. This profit is of the nature of the famous tax of Spain called alcabala; this tax, levied upon each successive sale, is the more enormous in the end by the number of the merchants in hands of whom commodities should have passed before being completed. A piece of cotton, for example, should have paid double profit, both to a merchant in Marseille, who have imported raw materials, and to a master of the textile mill, a manufacturer and retailer. This double profit is every time collected upon all the sum. When the wages of labourers become higher, the price of their produce soars only due to the number of work days for this produce. The increase of profit raises the price of produce in geometric proportion, and the increase of wages does only in arithmetic proportion. Thirdly, when the capital begins to grow, capitalists find it less easy to employ it. They are obliged to look for new ways to employ it, to unlock the secret of foreign manufacturers, or to invent better ones than foreign ones. Thus there takes place an industrial emulation for the benefit of consumers, which always has a tendency to produce all at lower prices and to improve all machines. Fourthly and finally, the rapidity of execution, and consequently the low prices depend for the most part upon the division of labour, so that each labourer, or each class of labourers, carries on only one of the simplest operations possible. In the city where there is a small capital allotted for watch-making, one labourer work on all parts of a watch. In Geneva, where this capital amounts to 5 or 6 millions, it is allocated to many merchants and manufacturers, each of whom confines himself only to one operation. It would be impossible to establish a circle of watch-making elsewhere which would be operated at as low cost as in Geneva, if enough capital were not so laid out at the same time that, allocated to 50 masters of workshops, it is sufficient to maintain every master in the full year, by carrying on only one of the operations of this circle.

Wednesday 8 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 08

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 251-52]

   Si le Gouvernement n’intervient point pour changer la marche naturelle des capitaux, ils donnent le profit le plus considérable qu’ils puissent donner, et les consommateurs font pour se procurer ce dont ils ont besoin le moins de sacrifices qu’ils puissent faire, eu égard à l’état du pays qu’ils habitent. Les revenus sont donc d’une part les plus forts possibles, de l’autre, ceux à qui ils appartiennent peuvent les employer avec le plus grand avantage possible, en sorte que tous les citoyens se trouvent dans la position la plus favorable pour faire des économies, et augmenter leurs fonds d’une partie de leurs revenus; aussi plus la société est libre de toutes les entraves que le Gouvernement peut mettre au commerce, et plus rapidement ses capitaux s’accroissent. A mesure qu’ils multiplient, on voit mettre successivement en œuvre par des fabrican[t]s nationaux les divers objets de première et de seconde nécessité, ceux qui ne sont qu’utiles, enfin ceux qui n’appartiennent qu’au luxe, parce que les consommateurs trouvant en plus grande abondance les objets de première nécessité, ne sont plus disposés à faire de si grands sacrifices pour se les procurer, et n’offrent plus à ceux qui les produisent des profits supérieurs à tous les autres. Alors les étrangers qui approvisionnoient [approvisionnaient] la nation, se trouvent peu à peu exclus de ses marchés, non point par des loix [lois], mais par la force des choses.

[Translation]

   If the government does not intervene to change the natural course of capitals, they give the highest profit that they can, and consumers make the least sacrifice that they can, to obtain what they have wanted, taking into account the state of the country where they live.
Then the revenue is the most largest possible on one hand, and those to whom it return can employ it to the most advantage possible on the other hand, so that all the citizens are in the best position to make savings, and to increase their stock using part of their revenue. Thus, the freer the society is from all the restrictions the government can put upon commerce, the more rapidly the capital of it grows. According as it grows, you see diverse objects of the second as well as of the first necessity successively produced by national manufacturers, such as conveniences and, finally, luxuries. This is because consumers, finding the most abundance of objects of the first necessity, are not inclined to make a large sacrifice to obtain them, and no longer offer any more profit to their producers than to any other sort of producers. Then the foreign countries which used to provide the nation find themselves being little by little excluded from its markets, not by laws, but by the natural course of affairs.

Tuesday 7 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 07

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 249-51]

   Si le pays n’a de capitaux que précisément ce qu’il lui en faut, pour mettre en mouvement ses laboureurs, ses artisans, et les fabrican[t]s des marchandises les plus volumineuses, il faudra qu’il attende avant d’entreprendre rien d’autre, que ses capitaux aient été multipliés par son travail, et par l’économie que chaque classe de la société pourra faire sur son revenu. Car il n’est pas douteux que si dès cette époque, il entreprend quelqu’autre ouvrage, il faudra pour mettre ses nouveaux ouvriers en mouvement, qu’il ôte aux anciens et aux plus nécessaires une partie de leur subsistance, et qu’il ferme leurs ateliers: Ce renversement de l’ordre naturel n’aura jamais lieu de lui-même, les ouvriers les plus nécessaires étant ceux pour lesquels le consommateur fait le plus de sacrifices et auxquels il accorde les plus gros profits; mais il peut résulter de l’impéritie du Gouvernement, si pour favoriser une nouvelle manufacture, celui-ci fait en sa faveur avec les revenus de la société des sacrifices plus grands encore que ceux que faisoit [faisait] le consommateur. Nous verrons dans les livres suivan[t]s tous les maux qui résultent d’une faveur si impolitique; nous pouvons cependant, d’après ce que nous avons déjà dit, prévoir dès à présent les suivan[t]s 1°. D’entre les ateliers les plus nécessaires à la nation, plusieurs seront fermés faute de capitaux, et plusieurs d’entre les ouvriers qui ne seront pas propres à l’industrie nouvelle perdront ainsi leur gagne-pain: 2°. Ceux des consommateurs qui malgré le sacrifice qu’ils étoient [étaient] disposés à faire, ne trouveront plus dans le pays les objets de première nécessité qu’il leur convenoit [convenait] d’y faire fabriquer, seront obligés de faire un sacrifice plus grand encore pour les tirer du déhors [dehors]. 3°. La perte qu’aura faite le Gouvernement pour établir la nouvelle manufacture, sera supportée par les revenus nationaux, et cette dépense sera encore augmentée par les frais du Gouvernement, soit pour lever l’impôt, soit pour appliquer son produit. Le revenu national sera donc diminué de tout celui qu’auroient [auraient] donné les ateliers qu’on a fait fermer, de tout celui que sacrifie le consommateur pour y suppléer, et de tout celui qu’on ôte au contribuable au delà de ce qui parvient au nouvel artisan. Voilà les moindres pertes qui puissent résulter d’un monopole, nous verrons par la suite qu’il en cause souvent bien davantage.

[Translation]

   If the country has no more capital than precisely needed for employment of its husbandmen, artisans, and manufacturers of the most bulky commodities, it will be necessary above all to wait for its capital to have grown due to its labour and to the savings each class of the society can make on revenue. This is because there is no doubt that, if it establishes any other branch before that time, it will be necessary for employment of new labourers that the country should appropriate the old and more required capital for part of their subsistence, and that it should close their workshops for which the capital used to be employed. This reversal of the natural order will not take place by itself, since the most necessary labourers are those for whom consumers make the most sacrifice and to whom they grant the most profit. But the reversal can take place due to the incompetence of the government, if it makes still more sacrifice of revenue of the society than consumers would, to give favourable treatment to a new branch of manufactures. We will in the following book see all the problems which result from so impolitic favourable treatment. Still, we can expect the followings at this stage according to what we have already said. First of all, some of the most necessary workshops for the nation will be closed for lack of capital, and some of labourers not good at the new industry will lose their stock in trade. Secondly, in spite of the sacrifice they are ready to make, some consumers no longer find in the country the objects of the first necessity which should be manufactured there, and will be obliged to make still more sacrifice because they must import them from abroad. Thirdly, the loss sustained by the government in establishment of the new branch of manufactures will be covered with the national revenue, and this expenditure is further increased by the cost of the government, either by levying the tax or by applying its produce. The national revenue will be therefore diminished by what the closed workshops would have produced, by what consumers sacrifice to supply the blank, and by what taxpayers pay beyond the gains of new artisans. These are the smallest losses that can result from monopoly, and we will see that it often causes some much larger losses.

Monday 6 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 06

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 249]

   Les capitaux qui lors des premiers développemen[t]s de l’industrie ne sont pas absolument nécessaires à l’agriculture, sont réclamés par celles d’entre les manufactures de nécessité première dont les produits ne peuvent presque pas supporter les frais de transport: de ce nombre sont plusieurs d’entre les étoffes qui servent à l’habillement des pauvres, comme aussi les meubles, et presque tous les outils d’agriculture.

[Translation]

   The capitals which are not absolutely necessary for agriculture at the time of the first developments of industry are required for those branches of manufactures of the first necessity where the produce can hardly cover the cost of transport; such as materials which serve for clothing the poor, furniture, and almost all sorts of agricultural tools.

Sunday 5 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 05

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 248]

   Plus on consacre de capitaux à la culture de la terre, plus on peut augmenter ses produits; quand on considère tout ce que le maraicher retire de son sein, on croiroit [croirait] à cet égard ses facultés infinies. Tous les capitaux que possède aujourd’hui la France, ne suffiroient [suffiraient] pas pour porter son agriculture au terme de prospérité le plus élevé auquel elle puisse parvenir. Mais ce n’est point à présent qu’une pareille masse de capitaux peut être employée au service de l’industrie rurale; quand celle-ci en a absorbé la partie absolument nécessaire pour la nourriture de la population actuellement existante, on n’obtient plus des profits si considérables en consacrant de nouvelles richesses à fertiliser la terre, et les autres branches d’industrie réclament celles qui restent, par l’offre de profits proportionnés à l’importance de chacune. Lorsque la population et la richesse s’accroissent, le moment vient de nouveau de faire de plus grands sacrifices pour tirer plus de fruits de la terre, et l’augmentation de son produit brut marche d’un pas égal avec le perfectionnement des autres arts utiles.

[Translation]

   The more capital is appropriated for culture of land, the more produce of land people can have. Considering all that which a market gardener reaps from his field, you might believe that land has infinite faculties in this respect. The whole capital France has today would not be sufficient for the arrival of the time of the highest prosperity that her agriculture can reach. But it is not at present that such a mass of capital can be employed at the service of the rural industry. If it has absorbed the completely necessary part of the capital for feeding the existent population, you no longer obtain so high profits from appropriating new wealth for improvement of land, and the other branches of industry demand the rest of the capital by offering profits in proportion to the importance of each branch. When the population and wealth grow, the new situation comes where you must make more sacrifice for a larger amount of the produce of land, and the increase of the gross produce keeps step with improvement of other useful arts.

Saturday 4 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 04

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 247]

   Ce sont les marchandises les plus volumineuses qu’il devient le plutôt profitable de produire sur les lieux où elles doivent se consommer, parce que c’est celles que le transport renchérit le plus. Si nous devions tirer notre blé et notre bétail du pays d’où nous tirons nos épiceries, à quel prix prodigieux ne nous reviendroient-ils [reviendraient-ils] pas? L’intérêt de la nation, celui du consommateur et celui de chaque capitaliste, exigent donc que les premiers capitaux disponibles soient employés à l’avancement de l’agriculture.

[Translation]

   It is the most bulky commodities that it turns out the most profitable to produce on the spots where they must be consumed, because the transport makes these the most expensive. If we must import corn and livestock from the country from which we import spices, what an exorbitant price must we pay for them? The interest of the nation, of consumers, and of each capitalist therefore demands that the first capitals available should be employed for improvement of agriculture.

Friday 3 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 03

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 246-47]

   Tant qu’une nation n’a pas des capitaux très considérables, et ce doit être le cas de la France, après une guerre ruineuse, une révolution désastreuse, et un système de finances aussi destructeur que celui des assignats, elle ne peut pas produire de tout. La consommation d’un pays vaste et peuplé requiert une production prodigieuse; mais c’est pour celle des objets de première nécessité que l’on ressent le besoin le plus pressant d’ouvrage, aussi l’industrie à laquelle elle est due offre-t-elle un profit plus considérable, attire-t-elle plus puissamment les capitaux, et affame-t-elle toute autre industrie moins féconde.

[Translation]

   If a nation does not have a large amount of capitals, as is the case with France, after a ruinous war, a disastrous revolution, and a destructive financial system like the assignats, the nation cannot produce at all. The consumption of a vast and populous country requires a surprising production, but it is for production of objects of the first necessity that you feel the most urgent need in order to impose labour, and the industry for that sort of production, therefore, offers a more profit, attracts capitals more strongly, and exhausts any less fertile industry.

Thursday 2 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 02

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 246]

   Ce n’est pas qu’un pays puisse ou doive ambitionner de réunir tous les genres de productions; il y en a pour lesquelles le climat, la position, le génie des habitan[t]s sont plus propres; les États qui ne pourroient [pourraient] lutter contre ceux-ci qu’avec désavantage doivent leur abandonner une industrie qui ne leur convient pas. C’est aussi ce qui arrive, à moins que le Gouvernement n’intervienne pour changer l’ordre naturel des choses; le négociant s’en tient aux manufactures où il peut faire valoir son capital avec avantage; jamais il n’en établit une qui ne lui rende pas le profit juste et raisonnable qu’il peut attendre de toute autre; or ce profit il ne peut l’espérer, si les produits de ses ateliers sont inférieurs en qualité ou supérieurs en prix à ceux des peuples que leur position appelle à faire plus avantageusement lé même commerce.

[Translation]

   This is not to say that a country can or must be eager to feature all the sorts of production. Some sorts of production are suitable for countries with a particular climate, location, or talent of inhabitants. Those which could fight against these countries only with disadvantage must leave an industry unsuitable for them to the countries. This also takes place as far as no government intervenes to change the natural order of things. Merchants are only attracted to manufactures where they can make use of their capital to advantage. Never do they establish any factory where they cannot attain such a just and reasonable profit as they can expect from any other. They cannot expect this profit if the produce of their workshops are inferior in quality or superior in price to that of peoples who can carry on the same trade to more advantage thanks to their location.

Wednesday 1 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 01

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 245-46]

Nous avons vu que le capital accumulé étoit [était] nécessaire pour mettre en mouvement un travail productif, et qu’il étoit [était] également nécessaire aux propriétaires de ce capital de le faire travailler pour qu’il devînt fructueux pour eux. Nous avons vu encore que pouvant maintenir à leur choix la classe d’ouvriers qu’ils croyoient [croyaient] la plus profitable, les capitalistes lorsque le commerce étoit [était] libre, réduisoient [réduisaient] tous les genres d’industrie au même niveau d’avantages. Il ne nous reste plus qu’à examiner comment une nation pauvre, avec un capital donné qui s’accroît progressivement par l’économie et la liberté du commerce, parvient successivement à faire végéter tous les différen[t]s rameaux de l’industrie nationale.

[Translation]

We have seen that the accumulated capital is necessary to set productive labour in motion, and that it is also necessary for owners of this capital to put it at work so that it may be fruitful for them. Furthermore, we have seen that, since capitalists can maintain the class of labourers who they believe are the most profitable as they like, they carry on all sorts of industry to the same rate of profit with trade free. Now all we have to examine is how a poor nation manages to make all the different branches of the national industry successively grow, with a given capital which progressively grows thanks to saving and to free trade.