Wednesday 4 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 03

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 252-255]

   Une fois maîtres d’ouvrir et de fermer la porte des professions lucratives, ils attachèrent les conditions les plus onéreuses à la condescendance qu’ils voulurent bien avoir encore d’enseigner leur métier; les jeunes gens reçus en apprentissage, non-seulement s’engagèrent à travailler pour eux sans rétribution, pendant un espace de temps toujours long, et toujours disproportionné à l’instruction qu’ils devaient recevoir, mais encore ils durent se soumettre à n’être que les domestiques de leurs égaux, se plier à une obéissance avilissante, et s’abaisser à des fonctions auxquelles les usages de la société ont attaché du ridicule ou du mépris. L’on sait que dans les villes d’Allemagne, les apprentis négociants doivent, un falot à la main, comme feraient les autres domestiques, aller chercher la femme de leur maître, à la porter des assemblées dont l’entrée leur est interdite. Une politique bien peu honorable a suggéré sans doute aux négociants allemands le projet d’avilir ainsi l’état par lequel ils ont tous dû passer. Ils ont voulu par là s’assurer d’écarter de leur profession, ceux que leur naissance et leur éducation rendraient plus délicats sur le rang qu’ils consentiraient d’occuper, parce que c’était ceux-là même, qui, possédant ordinairement le plus de capitaux, pouvaient leur faire la concurrence la plus dangereuse pour eux, et la plus utile pour le consommateur. Les négociants français n’ont point imité cette morgue allemande, ils n’ont pas poussé non plus la rapacité comme les Anglais, jusqu’à demander à l’apprenti, outre un service de sept ans, une compensation pécuniaire. La durée des apprentissages fixée par les statuts des six corps de marchands de Paris, était de trois ans pour les moins rigoureux, et de cinq pour les plus sévères, à la réserve du corps des orfèvres et joailliers qui exigeait un apprentissage de huit ans (1). Ces apprentissages étaient presque toujours gratuits de part et d’autre. Les statuts étaient cependant conçus de manière à assurer le monopole des marchands, sans pourvoir le moins du monde à l’instruction des élèves; car d’une part il était interdit à un marchand de tenir plus d’un apprenti il la fois, et de l’autre il n’était point obligé à en avoir un; ceux qui craignaient d’introduire dans leur maison quelqu’un qui pût se mettre au fait de leurs affaires, ou qui aimaient mieux l’obéissance implicite d’un domestique , que celle toujours incertaine d’un jeune homme doué de fierté, pouvaient donc ensevelir toutes leurs connaissances dans le secret, sans qu’il fut permis à leurs confrères de suppléer à leur négligence, en formant un plus grand nombre d’élèves.

[Translation]

   Once masters opened and closed the door to lucrative businesses, they attached the most bothersome conditions to the condescension that they badly wanted from teaching their trade. Young men allowed to enter into apprenticeship were not only found to work for the masters with no pay, usually for too long a time to match with the instruction that they had to receive; they also continue to resign oneself to being no better than domestic servants of their equals, living in degrading obedience, and carrying out duties to which the social convention attached ridicule and scorn. It is generally known that in German cities, apprentices for retailers should, as their other domestic servants would, go looking for the wife of their master with a lantern in hand, to the door of assemblies that they are forbidden from enter. Certainly, dishonourable calculation inclined German master retailers to degrade in this way the state through which they must all have gone. They hoped that this would certainly keep from their trade those whom birth and education would make more delicate in the ring that they would consent to occupy, because that these men, usually with the most capital, were able to be in the competition which is the most dangerous to the masters and the most useful to consumers. French retailers have not imitated this German arrogance, nor have they pursued greed so far as to demand apprentices a pecuniary compensation, besides seven years of service, like English counterparts. The duration of apprenticeship, specified by statutes of the six associations of merchants in Paris, was three years for the least rigorous, and five years for the most severe, except the associations of goldsmiths and jewellers which asked for eight years of apprenticeship (1). These species of apprenticeship were almost always without reward on both sides. The statutes were, however, intended to assure merchants of monopoly, without providing instruction for students in the least. That is because a merchant was prohibited from maintaining more than one apprentice at the same time on the one hand, and because he was not obliged to have one apprentice on the other hand. Those who feared introduction into their house of some one who was well informed of their affairs, and who liked the implicit obedience of a domestic servant, better than the uncertain obedience of a young man talented with pride, could, therefore, hold back all their knowledge, without allowing their colleagues to train a large number of students and to supply their negligence.