Thursday 9 July 2009

Book 1, chapter 9, paragraph 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 252-56]

   Une manufacture qu’une nation ne pouvoit [pouvait] exercer devient accessible pour elle par plusieurs causes, lorsqu’elle s’enrichit: 1.° L’accroissement des capitaux fait baisser le taux de l’intérêt, le profit du commerce et par conséquent le prix des marchandises. Comment les François [Français], par exemple vendroient-ils [vendraient- ils] leurs étoffes de coton au même prix que les Anglois [Anglais]? les premiers veulent que leur capital leur rapporte le vingt pour cent par an, parce qu’ils pourroient [pourraient] le gagner dans tout autre commerce, et qu’ils payent souvent jusqu’à dix pour cent d’intérêt pour le dépôt qu’ils ont en mains; les Anglois [Anglais] se contentent de gagner huit pour cent, parce qu’au point de richesse où ils sont parvenus, c’est le taux moyen des profits du commerce: il faudroit [faudrait] donc pour que le fabricant François [Français] vendît au même prix que l’Anglois [Anglais], que sa marchandise lui revînt de douze pour cent meilleur marché qu’au dernier. Mais lorsque les richesses de la France seront augmentées, il lui suffira qu’elle revienne au même prix, pour que le François [Français] soit assuré que la sienne, qui n’est chargée d’aucuns frais de transport, exclura celle des Anglois [Anglais] de tous les marchés de son pays. 2.° Le taux élevé de l’intérêt et du profit mercantile n’affectent pas moins le prix de la matière première que celui de l’ouvrage achevé; ce profit est de la nature de l’impôt fameux d’Espagne nommé Alcavala, qui se répétoit [répétait] à chaque vente successive, il se multiplie par le nombre des marchands entre les mains desquels a dû passer la marchandise avant que d’être achevée. Une pièce de coton, par exemple, a dû payer double profit au commerçant de Marseille, qui a importé la matière première; autant au chef de la filature, au fabricant, et au marchand détailleur [?]; or chaque fois ce doublement s’est prélevé sur toute la somme. Quand le salaire des ouvriers devient plus élevé, le prix de leurs produits n’est accru qu’en raison du nombre de journées de travail auxquelles ce produit est dû: l’augmentation des profits élève le prix de l’ouvrage dans une proportion géométrique, et celle des salaires seulement dans une proportion arithmétique. 3.° Lorsque les capitaux commencent à se multiplier, les capitalistes trouvent moins de facilité à les employer; ils sont obligés de chercher des voies nouvelles pour les faire valoir, de surprendre le secret des fabrican[t]s étrangers, ou d’en découvrir de supérieurs aux leurs. Il s’établit donc une émulation d’industrie au profit du consommateur, qui tend toujours à tout produire à meilleur marché, et à perfectionner toutes les machines. 4.° Enfin la rapidité de l’exécution, et par conséquent son bon marché, dépendent en grande partie de la division du travail, de telle sorte que chaque ouvrier, ou chaque classe d’ouvriers, ne soie chargée que d’une seule opération la plus simple possible. Dans les villes où il n’y a qu’un capital peu considérable destiné à l’horlogerie, le même ouvrier fait toutes les parties d’une montre; à Genève où ce capital s’élève à cinq ou six millions, il se divise entre plusieurs marchands et fabrican[t]s, dont chacun se limite à une seule opération. Il seroit [serait] impossible d’établir ailleurs une fabrique d’horlogerie, qui travaillât aussi bon marché que celle de Genève, si l’on ne lui destinoit [destinait] en même tem[p]s un capital assez considérable, pour que divisé entre cinquante chefs d’atelier, il suffit à entretenir chacun d’eux toute l’année, en ne l’occupant que d’une seule des opérations de cette fabrique.

[Translation]

   A branch of manufactures a nation used to be unable to carry on becomes accessible for the nation for some reasons, when it is rich. First of all, the growth of capital lowers the rate of interest, the profit of commerce, and consequently the price of commodities. How would the French, for example, sell their cotton drapery at the same price as the English? The former want their capital to bear 20 percent a year, because they could gain it from any other sort of commerce and often pay the interest up to 10 percent for the deposit they have in hands. The English are content to gain 8 percent, because this is the mean rate of profits of commerce at the stage of wealth they have reached. It would therefore be necessary that the drapery should cost the French 12 percent [point] less than the English, for the French manufacturers to sell at the same price as the English. But, when the wealth of France has increased, it will be sufficient if only the drapery should cost the same, because the French are assured that their drapery, to transport which it costs nothing, will exclude that of the English from all the markets in France. Secondly, the high rate of interest and of mercantile profit affects the price of raw materials as well as that of finished goods. This profit is of the nature of the famous tax of Spain called alcabala; this tax, levied upon each successive sale, is the more enormous in the end by the number of the merchants in hands of whom commodities should have passed before being completed. A piece of cotton, for example, should have paid double profit, both to a merchant in Marseille, who have imported raw materials, and to a master of the textile mill, a manufacturer and retailer. This double profit is every time collected upon all the sum. When the wages of labourers become higher, the price of their produce soars only due to the number of work days for this produce. The increase of profit raises the price of produce in geometric proportion, and the increase of wages does only in arithmetic proportion. Thirdly, when the capital begins to grow, capitalists find it less easy to employ it. They are obliged to look for new ways to employ it, to unlock the secret of foreign manufacturers, or to invent better ones than foreign ones. Thus there takes place an industrial emulation for the benefit of consumers, which always has a tendency to produce all at lower prices and to improve all machines. Fourthly and finally, the rapidity of execution, and consequently the low prices depend for the most part upon the division of labour, so that each labourer, or each class of labourers, carries on only one of the simplest operations possible. In the city where there is a small capital allotted for watch-making, one labourer work on all parts of a watch. In Geneva, where this capital amounts to 5 or 6 millions, it is allocated to many merchants and manufacturers, each of whom confines himself only to one operation. It would be impossible to establish a circle of watch-making elsewhere which would be operated at as low cost as in Geneva, if enough capital were not so laid out at the same time that, allocated to 50 masters of workshops, it is sufficient to maintain every master in the full year, by carrying on only one of the operations of this circle.