Thursday 18 December 2008

Preface, paragraph 02

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, iii-v]

Selon la manière dont on la cultive, cette science peut être en effet ou la plus dangereuse, ou la plus utile de toutes les études. Elle a pour but, non point des intérêts éloignés, et sur lesquels nous pouvons à peine avoir une légère influence, mais tout ce qui nous touche de plus près, tout ce qui nous importe le plus, nos lois, nos mœurs, nos propriétés, notre religion, notre liberté, quelquefois même notre existence. Lorsque les observateurs de la nature tombent, en étudiant ses lois, dans quelque erreur grossière touchant l’ordre qu’elle s’est prescrit, comme ils ne font que se traîner sur la surface de ses admirables ouvrages, sans pouvoir les altérer, elle se rit de leurs méprises, et n’en suit pas moins rigoureusement les règles invariables qu’ils ont méconnu; mais lorsque les politiques analysent les principes et la conduite des Gouvernemen[t]s, ils s’occupent des ouvrages des hommes, que d’autres hommes peuvent altérer ou détruire. Pour opérer une révolution, non pas dans la science, mais dans les choses, il leur suffit de persuader ou de convaincre ceux qui ont le pouvoir en mains. Ah! lorsque l’on réfléchit aux sources innombrables d’erreurs dans lesquelles les hommes sont forcés de puiser sans cesse, lorsque l’on voit le doute et l’incertitude envelopper les faits les plus rapprochés de nous, lorsque l’on a appris par une triste expérience, que les raisonnemen[t]s en apparence les plus forts et les mieux liés mènent souvent au mensonge, avec quelle inquiétude, avec quelle défiance doit-on présenter une nouvelle théorie qui peut compromettre nos intérêts les plus chers.

[Translation]

According to the way it is cultivated, indeed, this science can be the most dangerous or the most useful of all studies. The science does not deal with those interests which are very far from us and on which we can hardly exert the slightest influence, but with all those which will concern us the soonest, and which are the most important to us; our laws, our morals, our property, our religion, our freedom, and sometimes even our existence. While studying the laws of nature, some natural observers [natural philosophers] fall in some horrible errors in perceiving the order prescribed by her, and yet, as they are only reading the marvellous work by her, they cannot change it. In this case, nature laughs at their mistakes, and, as rigorously as before, observes those invariable laws which they do not recognise. To the contrary, when politicians [political philosophers] analyse the principles and the conduct of Government, they deal with the work by man, that is, that which man can corrupt or destroy. In order to bring about a revolution, not in theory, but in practice, they have only to persuade or to convince those in the saddle. Alas! Think of the countless sources of errors to which man is always exposed. Think of the ambiguity and the uncertainty entailed even by the affairs which are the most closest to us. Think of the fact, which you have learned by a sad experience, that the seemingly strongest and securest reasoning often leads to illusion. How disquieted and uncertain you should be in introducing new theories even if they can compromise our dearest interests!