Tuesday 31 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 11

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 288-290]

   M.r Herrenschwand dans son discours sur la population, se plaint amèrement du déclin des manufactures quant à la perfection de leur travail. En Angleterre, assure-t-il, elles se détériorent à mesure que les impôts augmentent. Comme beaucoup de gens se plaignent avec lui, de ce que la qualité des étoffes et des autres marchandises devient chaque jour plus mauvaise, il est bon d’examiner ces réclamations. En général, c’est l’intérêt du fabricant qui invente une étoffe nouvelle, de la rendre fort belle et fort bonne, et de la destiner à la consommation des gens les plus riches et du meilleur goût, pour que ceux-ci lui en payent un prix proportionné à la valeur supérieure de sa marchandise. Tous ceux dont la fortune est inférieure à celle de ces premiers, veulent cependant les imiter , et se procurer des étoffes qui paraissent semblables à celles qu’ils ont mises à la mode, si elles ne sont pas telles en effet. Pour satisfaire cette seconde classe de consommateurs, tous les autres fabricants s’empressent d’imiter la manufacture nouvelle, mais d’une manière moins dispendieuse, avec des matériaux moins bons, et des soins moins exacts; la vente de ces étoffes nouvelles devient plus rapide, celle des plus parfaites se ralentit, parce que les riches ne veulent plus d’une marchandise qui ressemble à celle que tout le monde achète. Il se forme bientôt une nouvelle manufacture pour eux, et celle qu’ils ont abandonnée trouve souvent plus profitable, de faire elle-même, comme les autres, la contrefaçon de son premier ouvrage, et de travailler pour la masse du Peuple, que de continuer à mettre beaucoup de soin à sa fabrication. Le Peuple profite donc toujours, et à bon marché, de toutes les découvertes qu’on avait faites dans les arts pour servir les riches; tandis que ceux-ci peuvent toujours trouver des marchandises parfaites, et adaptées à tous leurs désirs, encore qu’elles ne portent point la même dénomination que portaient celles dont s’habillaient il y a cent ans leurs devanciers, et dont s’habillent aujourd’hui les classes inférieures de la société.

[Translation]

   Mr Herrenschwand in his discourse upon population complains bitterly of the decline of manufactures as to improvement of their production. In England, he declares, manufactures are on the decline the heavier taxes are. Since a host of men complain with him that the quality of textile and other commodities is going lower and lower day by day, it is good to examine these complaints. In general, it is the interest of the manufacturer that invents a new kind of textile, to make it extremely beautiful and good, and to make it good for men of the most wealth and best taste to consume, for these men to pay him a proportional price to its higher vale for it. All those who are inferior in fortune to these first class men, however, try to imitate them, and to obtain woollen textile which looked similar to that in fashion if it is not identical in fact. To satisfy this second class of consumers, all other manufacturers are anxious to imitate the new manufactory, but in a more economical way, with worse materials, and with less care. This new textile has a quicker sale, and the most perfect has a more slugish one, because the rich no longer demande a commodity which resembles that which every one buys. There soon comes to being a new manufactory for the rich, and the manufactory that they have abandoned often finds it more profitable to pirate its first work like others, for itself, and to work for the mass of the people, than to continue to produce with much care. Therefore, the people always profit, at a lower cost, from all discoveries made in arts to serve the rich. On the other hand, the rich can always find some commodities perfect and adapted to their desires, though their favourite textile does not carry the same denomination as does that in which their predecessors were dressed a century ago, or in which the lower class are dressed today.

Monday 30 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 10

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 287-288]

   Pour faire des règlements semblables, on à consulté l’état actuel des choses, l’on n’a point ordonné des perfectionnements qui n’existassent pas, mais l’on a rendu l’art stationnaire, en pourvoyant à ce qu’il ne fit point de pas rétrogrades, et ne cheminât point non plus en avant. Le but avoué de ces règlements, n’était pas seulement d’empêcher que les consommateurs ne fussent dupés par les fabricants, mais aussi d’assurer à ces derniers, qu’il ne s’établirait point à leur portée quelque nouvelle fabrique, qui en imitant et perfectionnant leurs procédés pût leur faire une concurrence dangereuse. Le Gouvernement dans cette occasion, soutenait donc contre la nation, non point l’intérêt du commerce, mais celui de quelques fabricants particuliers. Il est dans la nature des manufactures de faire des progrès; celles de France ont prospéré tant que la fortune publique a été en croissant, non point à cause des entraves auxquelles on les avait soumises, mais en dépit d’elles.

[Translation]

   Those who implemented such regulations consulted the current state of things, and did not direct unknown improvements but rendered arts stationary by providing that it should be neither retrogressive nor progressive. The avowed purpose of these regulations was not only to keep consumers from fraud practiced by manufacturers, but also to assure manufacturers that there would be within their reach no manufactory which might come into dangerous competition with them by imitating and improving their process. On this occasion, therefore, the government did not underpin the interest of commerce, but that of particular manufacturers, against the nation. It is in the nature of manufactures to make progress; French manufactures prospered as the public fortune was on the increase, not due to obstacles to which they were subject, but in spite of the obstacles.

Sunday 29 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 285-286]

   Les règlements fabriques de drap, par exemple, fixent avec la plus grande précision, la longueur, la largeur, la qualité des laines, et le nombre des fils de chaîne qu’on devra employer dans la fabrique de chaque ville en particulier; ils infligent des amendes pour toute déviation de cet ordre établi, et chaque règlement contient un article analogue au § 9 du règlement du 20 Novembre 1708 (3), portant: «les marchands fabricants et les entrepreneurs de manufactures, ne pourront faire d’autres draps pour le Levant, que ceux des qualités portées par le présent règlement.» Ce qui revient à peu près à dire, il est défendu aux fabricants, soit de profiter des nouvelles découvertes et du perfectionnement de l’industrie, soit de se conformer au goût des consommateurs (4).

[Translation]

   The regulations of manufactories of woollen textile, for example, specify, with the greatest precision, the length, the width, the quality of wool, and the number of warp which should be employed in each city in particular. They provide that the manufactories should be fined if they deviate from this standard, and each regulation contains an article similar to clause 9 of the regulation of 20 November 1708 (3), which read that “manufacturing tradesmen and entrepreneurs of manufactories will not be allowed to produce other woollen textile for Levant than that of qualities specified by the present regulation.” This means virtually to say that manufacturers are prohibited from profiting both from new discoveries and improvement of industry and from conforming to taste of consumers (4).

Saturday 28 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 08

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 284-285]

   Le second motif qu’on a allégué au Législateur pour obtenir de lui en faveur des corps de métiers le droit d’admettre ou de rejeter de nouveaux confrères, n’est pas mieux fondé que celui que nous venons d’examiner. On lui a donné à entendre, qu’il était nécessaire de repousser tous ceux qui ne donneraient pas une preuve de leur habileté, en faisant leur chef-d’œuvre; sans quoi l’on verrait dégénérer rapidement les arts et l’industrie; et c’est aussi pour cela qu’on a étayé cette première loi des corps de métiers, d’une foule de règlements sur la manière dont doivent travailler les artisans, sur les qualités que doit avoir leur ouvrage, et sur les visites de jurés auxquelles il convient de l’assujettir; comme si les consommateurs auxquels il est destiné, et qui n’achètent que ce qui leur convient, n’étaient pas les meilleurs de tous les jurés pour l’inspection des fabriques.

[Translation]

   The second reason for which the legislator should accord trade associations the right to admit or reject new colleagues is no better grounded than that which we have examined. It has been suggested to him that it is necessary to reject those who would not show proof of their ability, producing their masterpiece. Otherwise, we could see arts and industry rapidly decline. Moreover, for that, we have reinforced this first law of trade associations, with a host of regulations upon the way for artisans to work, upon the due quality of their work, and upon the visitation of jurors of associations to which they should be exposed. This is as if the consumer at whom their work is to arrive and who buy only what pleases him were not the best juror for the inspection of manufactories.

Friday 27 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 07

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 283-284]

   On peut dire, il est vrai, qu’en restreignant le nombre des maîtres, on ne fixe pas toujours celui des ouvriers, lequel s’accroît ou diminue proportionnellement aux besoins du marché: c’est-à-dire, que l’on fait deux classes des artisans, l’une qui profite de tous les accroissements du marché, et l’autre qui souffre de tous les accidents, qui le diminuent. Les maîtres obtiennent un monopole qui va croissant comme leur marché devient plus étendu, les compagnons sont exclus de la faculté de partager les avantages dérivants du crédit que gagne leur profession. Les inconvénients attachés aux maîtrises subsistent en leur entier, par rapport à la société, mais par rapport aux artisans, ils sont partagés inégalement et injustement entr’eux.

[Translation]

   You may say, it is true, that even if you limit the number of masters, you do not always fix that of labourers, which increase or diminish in proportion to the needs of the market; that is to say, that artisans are divided into two classes, one of whom profits from all extensions of the market, and the other of whom suffers from all accidents which check it. Masters enjoy a monopoly which is going to grow as their market extends, and their assistant artisans are excluded from the right to share advantages derivative from the credit gained by their profession. The inconveniences attached to masters subsist as a whole with respect to the society, but, with respect to artisans, are divided unequally and unjustly among artisans.

Thursday 26 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 06

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 280-283]

   Le marché dans lequel les charpentiers exercent leur industrie est excessivement resserré; ou ils travaillent sur place, ou s’ils transportent leurs ouvrages les moins volumineux, ce n’est qu’à une fort petite distance; les autres métiers ont un marché plus ou moins étendu, en proportion du volume de leurs productions, comparé à leur prix, et de la facilité des communications dans leur voisinage. Le marché de tout producteur est circonscrit par le nombre de consommateurs pour lesquels le prix intrinsèque de sa marchandise rendue chez eux est aussi bas que leur prix relatif; or le nombre des artisans de tout métier doit nécessairement se proportionner au marché pour lequel ce métier travaille. Jusqu’à ce qu’il le fournisse tout entier, il n’y a point d’inconvénient à ce que ce nombre s’augmente, et l’on peut toujours être assuré que si le commerce et l’industrie sont libres, ou il ne passera pas au delà de la proportion requise, ou il y reviendra dès qu’il l’aura dépassée. Mais l’institution des maîtrises empêche le nombre des artisans de se proportionner au marché pour lequel ils travaillent; en le soumettant à une fixation arbitraire, elle doit nécessairement faire le mal, ou des consommateurs, ou des marchands et artisans; car il n’y a qu’une chance pour que le nombre convenable et le nombre légal se rencontrent, et il y en a mille pour qu’ils ne s’accordent pas. Si le nombre des maîtrises, ou celui des marchands, est fixé par un statut au-dessous de ce que demande le marché pour lequel ils travaillent; ce marché n’étant pas suffisamment fourni, ceux qui le pourvoient seront les maîtres d’élever le prix relatif de leurs ouvrages au-dessus du prix intrinsèque, et d’augmenter ainsi les dépenses de la nation. C’est ce qui arrive à l’ordinaire, puisque les marchands sont presque toujours les Législateurs de leur propre corps, et que leur avantage se trouve dans cette disproportion; mais il arrive aussi quelquefois que le marché d’un métier se resserre, le nombre des consommateurs dont le prix relatif est égal au prix intrinsèque du producteur allant en diminuant, soit que de nouvelles fabriques se soient établies plus à leur portée, que les transports soient devenus plus dispendieux, ou que la mode ait abandonné cette branche particulière de consommation. Dans ce cas les producteurs seront trop nombreux comparativement aux consommateurs, et la législation des maîtrises retardera le rétablissement de l’équilibre, en les attachant à leur corps, et en leur fermant l’entrée des autres professions. Ils sont donc forcés de travailler pour quelque chose de moins que le prix intrinsèque, et par conséquent de souffrir de la misère; en même temps que par la suppression de leurs profits légitimes, ils privent la nation d’une partie de ses revenus. En fixant le nombre de ceux qui exercent chaque métier, on l’empêche donc de se proportionner à ce que l’intérêt des consommateurs, celui des classes productives, et celui des artisans eux-mêmes auroient demandé.

[Translation]

   The market for which carpenters exert their industry is excessively narrow. They work, not moving from place to place, or transport their least voluminous works at an extremely short distance if they can. The other professions have a market more or less extensive, depending upon the volume of their produce in proportion to its price, and upon the easiness of communication in the neighbourhood of the market. The market of any producer is limited by the number of consumers who think the intrinsic price of his commodity delivered to them to be as low as their relative price. The number of artisans in any trade should necessarily be in proportion to the market for this trade. Until it is entirely full, there is no obstacle to the increase of this number. We can always be certain that, with free trade and industry, it will not pass beyond the due proportion, or will come back to it as soon as the number has passed beyond it. However, the institution of masters keeps the number of artisans from being in proportion to the market for which they work. By fixing the number to an arbitrary level, the institution should necessarily do harm to consumers or merchants and artisans. This is because only by chance are the appropriate number and the legal number equal, and in most cases they are not. If the number of masters or merchants is legally fixed below the level demanded by the market for which they work, this market will not be sufficiently filled, and those remaining in the market will be allowed to raise the relative price of their works above the intrinsic price, and, therefore, to have the nation run up expenses. This usually happens because merchants are almost always the legislators of their own association, and because their advantage is found in this disproportion. However, it happens some times, too, that the market for a trade shrinks, and that the number of consumers whose relative price is equal to the intrinsic price of the producer diminishes gradually. It does not matter whether this is because some new manufactories are established more within the reach of consumers, because the cost of transport has been higher, or because this particular branch of consumption has gone out of fashion. In any of these cases, the producers will be too large in number in comparison to the consumers, and the legislation for masters will put the restoration of the balance on hold, sticking them to their association, and keeping them from entering into another profession. Therefore, they are forced to work for some thing below the intrinsic price, and, as a consequence, to suffer from misery. At the same time, the suppression of their legitimate profits deprives the nation of a part of her revenue. The specification of the number of those who engage in each trade, therefore, means that it can be out of proportion to the demand from the interest of consumers, of productive classes, and of the artisans themselves.

Wednesday 25 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 05

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 280]

   Lorsque l’industrie et le commerce sont libres, le nombre d’ouvriers dans chaque métier, celui de commerçons dans chaque négoce, doit se proportionner toujours aux besoins de la consommation. S’il n’y a de l’ouvrage que pour dix charpentiers dans une ville, au cas qu’il s’en forme douze ou quinze, ceux-là ne faisant que l’ouvrage pour lequel dix auraient pu suffire, ne retireraient entr’eux tous que le salaire qu’on aurait donné à ces dix; ils gagneraient donc moins qu’ils n’auraient pu gagner en embrassant tout autre métier: les moins habiles d’entr’eux, ou passeraient à une autre profession, ou quitteraient le pays en cherche d’ouvrage, et personne ne se présenterait pour remplir leur poste, jusqu’à ce que l’équilibre entre les divers métiers fût rétabli.

[Translation]

   With free trade and industry, the number of labourers in each business, and that of merchants in each trade, should always be in proportion to the needs of consumption. If there were employment only for ten carpenters in a city in the case where there are twelve or fifteen carpenters, they would only do work for which ten would have been sufficient, and would receive the wages the ten would have been given by the gross. Therefore, they would gain less than if they had tried any other trade; that is, if the least skilful men among them had transferred to another profession or had left the country for employment. In this case, no one would make the appearance to supply their vacancies, until the balance among different trades is restored.

Tuesday 24 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 04

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 278-280]

   La première et la plus ordinaire de ces entraves, c’est de limiter le nombre des maîtrises, et d’attacher le droit d’y parvenir à des conditions plus ou moins difficiles à remplir (2). L’on a représenté au dépositaire de la souveraineté, d’une part que si l’on ne limitait pas le nombre des maîtres, il se multiplierait à l’infini; de l’autre que si l’on n’exigeait pas d’eux un examen pour leur réception, ils négligeraient de s’instruire dans leur art, et que l’industrie tomberait en décadence; on l’a induit en errera, quant à l’une et à l’autre de ces suppositions.

[Translation]

   Of all these obstacles the first and most ordinary is to limit the number of masters and to attach some conditions hard to meet to the right to be a master (2). The depositary of sovereignty has been told, on the one hand, that masters would proliferate infinitely if he did not limit their number, and, on the other hand, that they would neglect to master their art were they not required to take an examination to be a master, and the industry would fall into decline. This way he has been led into error concerning both these suppositions.

Monday 23 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 03

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 278]

   Toutes les fois que l’on accorde aux gens qui exercent le même métier le droit de s’assembler, d’élire des officiers, de se donner des statuts, et d’agir en corps, on leur fournit les moyens de se combiner et de s’entendre, pour combattre contre tout le reste de la société. Les statuts qui naissent des délibérations de ces corporations, loin d’être une compensation du danger qui y est attaché, sont le plus souvent eux-mêmes vicieux, et donnent de nouvelles entraves au commerce, que l’on devrait chercher à affranchir.

[Translation]

   Whenever men engaging in the same trade are accorded the right to assemble, elect officials, enact statutes and behave in cooperation, they are provided with the means to combine and be listened to, to fight against the rest of the society. The statutes originating from deliberations of these corporations, far from compensating the danger attached to them, are the most often vicious in themselves, and give new obstacles to trade, the freedom of which we are desirous of.

Sunday 22 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 02

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 276-278]

   Une ligue entre des acheteurs ou des vendeurs, dont le nombre ou les besoins sont invariables et absolus, n’augmenterait pas pour long-temps leurs forces, mais une ligue entre des gens qui disposent de leur propre nombre, et qui peuvent régler leurs besoins, les augmente considérablement. Si des marchands prennent la résolution de ne pas vendre ou de ne pas acheter au delà d’un certain prix, ils peuvent la tenir sans perte pour chaque branche de commerce en particulier, mais des propriétaires de terre ne peuvent tenir celle de ne pas affermer leurs terres, sans perdre leur revenu, ni des ouvriers celle de ne pas travailler, sans perdre leur subsistance, ni enfin des consommateurs celle de ne pas acheter, sans se priver de ce qui leur est le plus nécessaire. Une ligue entre des marchands pour faire hausser les prix, peut donc se tramer lentement, et se continuer pendant des années, tandis qu’une ligue d’ouvriers pour faire hausser les salaires, ou une ligue de consommateurs pour faire baisser les prix peut être qu’une effervescence momentanée, que les besoins de chaque individu doivent calmer. Il est vrai que pour cette raison même, les ligueurs se trouvant dans un état violent, et qu’ils sentent ne pouvoir durer, donnent à leur coalition tous les caractères du tumulte et de la sédition; tandis que les marchands peuvent masquer la leur de tous les dehors de la tranquillité et de l’ordre; mais puisque les unes et les autres de ces combinaisons, tendent également à altérer l’équilibre naturel entre les acheteurs et les vendeurs, à dénaturer les prix, et à augmenter les dépenses, ou deminuer les revenus nationaux, un Gouvernement juste doit les réprimer également, et se tenir plus en garde peut-être, contre celles qui s’enveloppent d’un voile, et n’excitent point de trouble dans l’État, comme étant ordinairement les plus puissantes et les plus dangereuses, que contre celles que le désordre qui les accompagne démasque au premier coup d’œil.

[Translation]

   A league among purchasers or sellers whose number or needs are invariable and absolute would not increase their powers in the long run. However, a league among men who can change their number at their will and can control their needs increases their powers to a considerable degree. If merchants decide not to sell or not to buy at any higher than a certain price, they can stick to the decision without loss for any branch of commerce in particular, but landlords cannot stick to the decision not to rent their estates without losing their revenue, nor can labourers that not to work without losing their subsistence, nor can consumers that not to buy without being depriving of what is the most necessary for them. A league among merchants for higher prices can, therefore, be slowly hatched, and be maintained for some years, while a league among labourers for higher wages, or among consumers for lower prices, can be only a temporary enthusiasm, which must soon clam down due to the needs of each individual. It is true that, for the very reason, members of the league, finding themselves in a situation which is violent and which they feel cannot last for so long, attach all characters of turmoil and sedition to their coalition, while merchants can make theirs look tranquil and orderly. However, since both these combinations tend equally to change the natural balance between purchasers and sellers, to divert prices from their natural level, and to increase expenses or decrease national revenues, the just government should suppress both these combinations equally, and should be on its guard, probably, more against those which are veiled and do not make trouble for the state, as being ordinarily the most powerful and dangerous, than against those which are debunked at first sight from the disorder accompanying them.

Saturday 21 August 2010

Book 3, chapter 5, paragraph 01

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 274-275]

Les marchands qui donnèrent des lois au commerce dans les onzième et douzième siècles, ne crurent point encore avoir assez fait pour s’assurer d’un monopole contre les consommateurs, lorsqu’ils eurent hérissé de difficultés l’entrée du commerce et des arts, en exigeant un apprentissage de tous ceux qui voudraient les exercer, et en rendant cet apprentissage pénible, long et fastidieux; ils jugèrent convenable de se réunir en corporations, de se donner des chefs et des règlements, de convenir entr’eux d’une certaine subordination, et de fixer par une loi expresse le nombre de ceux qui pourraient exercer leur métier. Dans toute l’Europe presque toutes les branches de commerce se sont réunies de cette manière, leurs règlements ont été presque partout sanctionnés ensuite par l’autorité souveraine, et sont restés en vigueur, jusqu’à l’époque de la révolution pour la France, dans d’autres pays jusqu’à ce jour. Cependant chaque institution de corporation, est une ligue formée contre le consommateur et la société, en sorte que le Gouvernement, loin de les confirmer, aurait dû chercher à prévenir leur naissance, ou à les détruire, autant que cela pouvait s’accorder avec la liberté de tous (1).

[Translation]

The merchants who gave laws to commerce in the eleventh and twelfth centuries did not believe that there was much enough done to ensure them a monopoly against consumers, when they had made it difficult to enter into commerce and arts, imposing an apprenticeship upon all those who would like to engage in them, and making this apprenticeship painful, long, and disgusting. They judged it adequate to combine into associations, to create a leadership and regulations therein, to reach an agreement on certain subordination, and to have a rule specify the number of those who could engage in their trade. In almost all branches of commerce all over Europe, combinations were given birth to in this way; their regulations were later sanctioned almost everywhere by the sovereign authority, and were effective until the time of the revolution in France and have been so until today in other countries. However, every institution of association is a league formed against the consumer and the society, so that the government, far from sanctioning them, should have sought to prevent their establishment, or to dissolve them, as long as it conforms to liberty for all (1).

Friday 20 August 2010

Book 3, chapter 4, footnote 04

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 269-272]

(4) Quel sujet de réflexions que la conscription! et pourquoi le moment de s’y livrer ne serait-il pas venu? Sans doute pendant qu’une guerre cruelle nous forçait à déployer toutes nos ressources, il fallait se garder d’attaquer la plus énergique; mais à présent la paix nous est rendue, et la paix doit faire disparaître avec les fléaux de la guerre, la crainte d’en déplorer les suites. Comme ce n’est pas dans une note qu’on peut approfondir une matière si compliquée, je me contenterai de remarquer, que puisque chez un Peuple aussi belliqueux que le Français, les enrôlements volontaires suffisent amplement en temps ordinaire à l’entretien des armées, on ne peut comparer les deux modes de recrutement, sans voir avec douleur tout ce que la nation perd par celui qu’elle a adopté, quant à sa liberté, à ses mœurs, et à ses richesses.
   Quant à sa liberté; puisqu’il n’est point vrai que le service personnel soit une conséquence d’une constitution libre; dans les petits Etats de la Grèce, de l’Italie et de la Suisse, tout citoyen devait défendre sa patrie de son bras, parce qu’il n’était point obligé pour le faire, de s’éloigner de ses foyers, que la guerre ne durait que peu de jours, que l’obéissance était limitée par la durée de l’expédition, et qu’en devenant soldat, il ne cessait pas d’être citoyen. D’après les mêmes principes, on ne peut qu’applaudir à l’établissement des gardes nationales sédentaires en France, et des milices en Angleterre et en Amérique: mais la troupe de ligne est sur un pied bien différent: son obéissance est illimitée, les sacrifices que l’on demande au soldat, sont les plus grands qu’un homme puisse faire; il doit quitter le sol qui l’a vu naître, sa famille, ses amis, ses habitudes; au moment où son cœur s’ouvre peut-être à l’amour, il doit renoncer au mariage, à moins qu’il ne le précipite inconsidérément; il doit suivre ses drapeaux, au milieu des privations, des besoins, des souffrances, peut-être jusque sous la zone torride, au travers des sables brûlants de la Lybie, peut-être jusqu’auprès du Pôle, sur les tristes rochers de Terre-neuve; et pourquoi? pour aller obéir, servir, et se battre. Sont-ce là les droits d’un homme libre?
   Quant aux mœurs; les enrôlements volontaires conduisent surtout aux armées des désœuvrés, et des libertins. La sévérité de la discipline militaire les retient dans les lignes du devoir, elle en fait des citoyens utiles, dès qu’elle les emploie à la défense de la patrie; souvent même elle réussit à corriger leurs vices, et elle inspire un sentiment nouveau d’honneur et de retenue, à ceux qui auraient peut-être déshonoré la nation par leurs débauches ou leurs crimes. Il est avantageux pour les mœurs de retenir de semblables hommes au service, il est funeste pour elles d’y faire entrer des gens simples et vraiment vertueux. Autant la règle militaire élève les premiers au-dessus de la crapule, autant elle rabaisse les seconds au-dessous de l’innocence. Un coup d’œil sur les hôpitaux militaires, sur les progrès effrayants d’une maladie honteuse, dans des campagnes où elle avait toujours été inconnue, donnera la mesure de ce que les parents peuvent craindre de la dangereuse éducation des camps.
   Quant à la fortune nationale; qui pourrait calculer toutes les pertes que la conscription doit occasionner à l’Etat? perte d’instruction dans le moment où elle est accomplie, et où toute l’aptitude que le jeune homme a acquise dans les arts, les métiers ou les sciences, est abandonnée et mise en oubli; perte de travail dans la plus grande vigueur de l’âge, et lorsque l’homme est appelé par la nature à pourvoir de son bras aux besoins de son vieux père, puisque la sagesse éternelle a fait rencontrer l’époque du plus grand déploiement de forces des enfants, avec celle de l’affaiblissement des parents; perte de zèle, de constance et d’ardeur pour l’ouvrage, dans le moment où les habitudes se forment, et où le cachet qui doit décider du sort de la génération naissante, s’imprime pour jamais sur son caractère. Hélas! ce cachet doit-il porter l’empreinte de l’oisiveté! perte pécuniaire souvent ruineuse, lorsque le conscrit se rachète du servie, ou cherche à s’y dérober par la fuite. Ah! sans doute, celui qui déterminera la Législature à mettre un terme à tant de maux, et à distinguer une loi de circonstance d’avec une loi fondamentale, aura bien mérité de l’humanité.

[Translation]

What a subject of reflection conscription is! Why could you say that the time for this reflection has not come yet? No doubt, while a cruel war forced us to employ all our resources, we had to be careful not to attack the most energetic, but now peace has come back to us, and must make the fear to moan about the aftermath of the war gone with its calamities. As it is impossible to expound such a complicate theme in a note, I contend myself with noting that volunteer enrolment is entirely sufficient to maintain an army in peacetime in a country of a warlike nation like France, and that we cannot, therefore, compare these two ways of recruitment, without seeing easily all damages to which the choice of France has exposed her national liberty, manners, and wealth.
   First of all, let us turn to her liberty. Since it is not true that the personal service is a consequence of a free constitution, every citizen of small states in Greece, Italy or Switzerland was obliged to defend his home-country with his arms. This is because he did not have to be so far from his home-country in the war, did not soldier in the war for any more than a few days, have only to obey in the duration of expedition, and did not cease to be a citizen by becoming a soldier. According to the same principles, we can only approve the establishment of the standing national army in France, and the militia in England and America. However, the military unit on the front is in widely different situations. Its obedience is unlimited, and the sacrifices demanded of the soldier are the greatest that a man can do. He must leave the country where he, his family, his friends, and his customs were born. When he falls in love, he must probably give up his marriage, unless he lets it end in failure thoughtlessly. He must follow the regimental colours in the thick of privation, necessity, and patience, to the scorching zone across burning sands in Libya, or to a place near the pole upon cruel rocks in Newfoundland. Then why does he have to obey, serve, and battle? Are these the obligations of a free man?
   Secondly, let us turn to manners. The volunteer enrolment leads above all to an army of unemployed and libertines. The severity of military discipline aligns them with obligation, and makes them useful citizens, as soon as it employs them for the defence of the home-country. It is often successful even in correcting their vices, and inspires a new sentiment of honour and reservation to those who would have probably dishonoured the nation with their abuses and crimes. It is advantageous to manners to keep this kind of people in the service, and it is fatal to manners to accommodate simple and really virtuous people there. So the military rule elevates the former kind of people above a mob, while it corrupts the second people below a group of innocents. A look inside military hospitals at the terrifying spread of a disgraceful disease, in countries where it used to be unknown, will make us understand exactly what the parents can fear of the dangerous education in camps.
   Finally, let us turn to the national fortune. Who could calculate all losses that conscription should occasion to the state? These contain a loss of instruction at the time when it is accomplished, or when all the aptitude acquired by the young man in arts, trades, or sciences is abandoned and left into oblivion: a loss of labour when the man is at the age of the most vigour, and naturally tends to satisfy with his hands the needs of his old father, because the eternal wisdom has made the greatest display of power of children coincide with the waning of their parents’: a loss of zeal, patience, and ardour for work, at the time when habits are formed, and when a style which should decide the fate of the coming generation is inscribed for ever upon their character. Alas! This style should carry the trace of laziness! A pecuniary loss is often ruinous, when the conscript is released from the service, or seeks to avoid it by being a deserter. Ah! No doubt, if a man decides the Legislature to bring so many evils to an end, and to distinguish an opportune law from a fundamental law, he will merit the honour of humanity.

Thursday 19 August 2010

Book 3, chapter 4, footnote 03

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 263-264]

(3) Dernièrement, un négociant estimé s’était associé à un homme de lettres, pour ouvrir à Genève une école pratique de, commerce, fondée à peu prés sur les principes exposés ci-dessus; des circonstances malheureuses, et qui tiennent aux intérêts particuliers des instituteurs, ont fait manquer cette entreprise au moment où son succès paraissait assurés. Peut-être y avait-il à Rome des écoles, pour les arts et le commerce, afin de suppléer à l’apprentissage inconnu aux anciens. Columelle ne connaissait de son temps que la seule agriculture qui n’eût pas des maitres particuliers. De Re Rustica. L. I. p. 2.

[Translation]

(3) Recently a respectable merchant was associated with a man of letter, in order to open a practical school of commerce in Geneva, almost exclusively upon the principles expounded above. Circumstances which are unhappy and dependent upon particular interests of instructors made this enterprise impossible even when its success seemed certain. Probably, there were in Rome some schools for arts and commerce, for the purpose of supplying the absence of apprenticeship in the ancient age. Columelle knew no trade which had no individual masters in his times, except agriculture. De Re Rustica, book 1. p. 2.

Wednesday 18 August 2010

Book 3, chapter 4, footnote 02

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 255-256]

(2) En France ce statut mercantile avait été sanctionné par l’ordonnance de 1673. Tit. I. Art. 3, d’après laquelle aucun ne peut être reçu marchand, s’il ne rapporte son brevet, et son certificat d’apprentissage. En Angleterre, par le stat. 5. Elizab. c. 4. § 31. D’après lequel les personnes qui ont servi pendant sept ans comme apprentis à un commerce ou métier, ont un droit exclusif pour exercer ce commerce ou métier dans toute l’Angleterre. Cependant ce statut étant en général considéré comme onéreux, et contraire à la liberté naturelle, les décisions des Cours de justice ont tendu à en restreindre l’effet. L’apprentissage n’est requis que pour les métiers déjà existants sous le règne d’Elizabeth, lorsque ce statut passa en Parlement; de là vient cette distinction bizarre, qu’il faut avoir été en apprentissage pour faire des chariots, et non pas pour faire des carrosses. Blackstone. Comm. on the laws of Engl. Book I. Chap. XIV. p. 428. Wooddeson systematical view of the laws of Eng. Lect. 17. T. I, p. 466.

[Translation]

(2) In France, this mercantile statute had been sanctioned by the ordinance of 1673, title 1, article 3. According to this, no one can be an authorised merchant without producing a charter and a certificate of apprenticeship. In England, it had been so by the statute 5, Elizabeth, c. 4, article 31. According to this, those who have served their seven-year apprenticeship for a trade or art have an exclusive right to engage in this trade or art all over England. However, this statute was generally considered as costly and contrary to natural liberty, and the Court of Justice has tended to restrain its effect by rulings. Apprenticeship is only required for the trades which already existed under the reign of Elizabeth when this statute passed through Parliament. This gave birth to this strange distinction that apprenticeship is necessary to make wagons, while not to make coaches. Blackstone, Commentaries on the Laws of England, book 1, chapter 24, p. 428. Wooddeson, A systematical view of the laws of England, lecture 17, title 1, p. 466.

Tuesday 17 August 2010

Book 3, chapter 4, footnote 01

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 254]

(1) L’Edit du mois d’Avril 1777 avait changé à bien des égards la Législation Française sur les apprentissages, et en avait réduit uniformément la durée à quatre ans.

[Translation]

(1) The edict of April 1777 had changed the French legislation of apprenticeship in many respects, and had reduced the duration of apprenticeship uniformly to four years

Monday 16 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 15

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 269-273]

   Mais l’on ne peut, ce me semble, se dispenser d’apporter quelque modification à la partie de nos lois, qui regarde la conscription militaire (4). Le travail étant souvent la seule propriété de l’ouvrier; c’est aussi là seule qu’il puisse aliéner, soit en échange contre l’instruction, soit pour se procurer ce dont il a besoin dans ses maladies, ou lorsqu’il forme un nouvel établissement. La loi qui annule tous ses engagements lorsqu’il parvient à l’âge de vingt ans, pour l’envoyer aux armées, détruit nécessairement toute confiance de la part des maîtres, et les dégoûte absolument de consacrer leurs capitaux et leurs peines à former ou établir des ouvriers, qui leur seront enlevés. Je n’entreprendrai point d’indiquer quelle autre marche l’on pourrait suivre, mais je me contenterai de faire des vœux pour que le retour de la paix fasse naître une législation moins rigoureuse sur les enrôlements forcés.

[Translation]

   However, it seems to me that one cannot dare to carry some modification to the part of our laws which concerns the military conscription (4). As labour is often the only property for a labourer, this is also all that he can alienate, be it in exchange for instruction, or for what he needs when he catches his diseases, or forms a new establishment. The law which cancels all his commitments when he reaches the age of twenty, to send him to the army, destroys by necessity all confidence on the part of masters, and discourages them completely from devoting their capitals and pains to training or establishing labourers, of whom they will be deprived. I will not dare to imply what other footsteps we could follow in, but will content myself to hoping that the return to peace will give birth to legislation less rigorous with the forced enrolments.

Sunday 15 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 14

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 268-269]

   Le Ministère désireux aujourd’hui de restituer aux engagements pris pour cause d’apprentissage leur ancienne vigueur, paraît embarrassé sur la manière de les rendre exécutoires, lorsque les apprentis seront de mauvaise foi; pour les forcer, ainsi que les ouvriers qui contractent avec un maître, à tenir leurs engagements, il semble chercher quelque expédient nouveau, et c’est sans doute à ce désir qu’il faut attribuer l’invention d’un livret dont seraient munis tous les ouvriers, à leur sortie d’apprentissage, et sur lequel devrait se trouver successivement l’acquit de tous leurs divers engagements. Ce règlement est l’un des principaux d’entre ceux que contient le nouveau projet de loi relatif aux manufactures et aux gens de travail, sur lequel le Ministère de l’intérieur a consulté le commerce. Il n’est pas sûr que cette innovation n’entravât pas à bien des égards les relations des journaliers avec leurs maîtres, et l’on ne voit pas pourquoi la poursuite par-devant les Tribunaux, et la contrainte civile, ne suffiraient pas dans un pays où l’on maintient une bonne police, pour les obliger à remplir leurs engagements.

[Translation]

   The minister who today wishes commitments involved in apprenticeship to regain their former vigour seems to be embarrassed with the way to make them enforceable when apprentices are ill-intentional. In order to force apprentices, as well as labourers who contract with a master, to honour their commitments, he seems to seek for some new expedients, and we must undoubtedly attribute to this desire the invention of a kind of record book which would be handed to all labourers at the end of their apprenticeship, and which must record the receipt of all their various commitments. This is one of the principal regulations among those included by the new legislative project regarding manufactures and labourers, upon which the minister of interior has consulted commerce. It is not sure whether this innovation may not harm the relations of day-labourers to their masters in many respects, and no one can see why judicial proceedings and civil distress would not be sufficient to oblige them to honour their commitment in a country which maintains good police.

Saturday 14 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 13

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 266-268]

   C’est sans doute pour donner cette première impulsion, que le Ministre de l’Intérieur a proposé l’établissement d’écoles d’instruction pratique pour les arts chimiques. Ce n’est pas en effet qu’il se soit flatté d’instruire à de pareilles écoles, un nombre d’artisans proportionné aux besoins et à la population de la France; mais il a senti combien il serait avantageux de faire voir aux journaliers, qu’ils peuvent recevoir une instruction pour leur métier, plus approfondie, plus utile, plus courte et moins dispendieuse, que celle à laquelle ils parviennent aujourd’hui en se mettant en apprentissage: ce trait de lumière réveillerait leur attention sur les moyens d’apprendre, et hâterait la formation d’une classe d’instituteurs privés, les seuls qui puissent se proportionner aux facultés et à la position des élèves qu’ils auraient à former. Tous les artisans instruits dans les écoles nationales y apprendraient comment l’on peut mettre l’art à la portée des jeunes gens, leur ouvrir l’esprit, et tirer parti en même temps du travail qu’on leur fait faire. De retour dans leurs villes ou leurs villages, ils ne se borneraient pas à faire eux-mêmes leur métier, ils trouveraient plus de profit encore à l’enseigner bien et promptement; cet enseignement par lequel ils débuteraient, serait pour eux un moyen assuré de rassembler un petit capital, de disposer du travail de plusieurs bras, et de former un atelier indépendant. C’est ainsi que les découvertes nouvelles passant rapidement du cabinet du chimiste ou du mécanicien, aux écoles publiques d’instruction pratique, de celles-ci à tous les nouveaux instituteurs des villes et villages, et de ces instituteurs aux ateliers de tous les artisans, l’on verrait le perfectionnement des métiers marcher d’un pas égal avec celui de la science, et nos manufactures s’assurer promptement cette supériorité, que l’esprit inventif des Français doit leur procurer un jour. Pour obtenir des succès aussi flatteurs, aucune coaction ne serait nécessaire; liberté parfaite, protection, et bon exemple, ce serait tout ce que le Gouvernement aurait à accorder.

[Translation]

   No doubt, it was for the purpose of giving this first impetus that the minister of interior proposed the establishment of schools for practical instruction for chemical arts. In fact, it is not that he contented himself with instructing at these schools a number of artisans in proportion to the needs and population of France, but he felt how advantageous it would be to show day-labourers that they can receive an more profound, useful, prompt and inexpensive instruction for their business than they receive today in apprenticeship. These traits of instruction would attract their attention again to the means of learning, and would promote the formation of a class of private instructors, who alone can adapt themselves to the faculty and position of the students that they would have to train. All artisans instructed at national schools learn there how one can at the same time place arts within the reach of young men, transmit the spirit to them, and take advantage of their forced labour. Returning to their cities or villages, the artisans would not be confined to doing their business for themselves, and would find much more advantages in teaching it well and promptly. This teaching with which they would start would be a sure means for them to raise a small capital, to dispose of the labour of several hands, and to establish an independent workshop. Thus, new discoveries pass from the cabinet of chemists or mechanics to the public schools of practical instruction, from the latter to all new instructors of cities and villages, and from these instructors to the workshops of all artisans, and we could see the improvement in business in step with that in science, and have assurance that our manufactures will promptly achieve the superiority that the inventive spirit of the French people must procure some day. No coercion would be necessary to reach such a satisfying success; all the government have to accord would be perfect liberty, protection and good example.

Friday 13 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 12

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 265-266]

   Mais dira-t-on, d’où vient qu’aucune école ne s’est formée pour les arts ou pour le négoce, quoique toutes les entraves que les anciens statuts mettaient au commercé aient été détruites par la révolution? Plusieurs causes y ont contribué. Depuis le commencement de la révolution jusqu’au 18 Brumaire, l’industrie française a été constamment dans un état de découragement et de décadence. Ce n’est pas au milieu de ses revers que l’on pouvait songer à de nouveaux établissements utiles. Les coups qui ont été frappés sur elle, comme le maximum, la création, puis la chute des assignats, les taxes révolutionnaires, ont détruit l’énergie des classes productives. Les Tribunaux en cessant de maintenir l’exécution des contrats volontaires, et en affranchissant de leurs engagements ceux qui étaient entrés en apprentissage, ont outrepassé leur but, et détruit la confiance entre ceux qui pouvaient contracter de nouveau. La conscription militaire, ou les réquisitions, en arrachant les apprentis à leurs ateliers, à mesure qu’ils acquéraient la connaissance de leur art, a découragé les élèves aussi bien que les maîtres. Enfin lorsque aucune de ces causes n’aurait existé, il faudrait toujours un assez long espace de temps, pour changer les habitudes des classes inférieures d’un grand Peuple, et pour que l’on songeât à former pour elles les établissements qui leur conviennent le mieux. Un exemple donné par le Gouvernement peut souvent dans ce cas servir d’impulsion, et amener par la suite les changements les plus heureux.

[Translation]

   But we will be asked why no school has been instituted for arts and commerce, though all restraints imposed upon commerce by ancient statutes were abandoned by the revolution. Several causes have contributed to that. Since the eruption of the revolution until the 18th of Brumaire, the French industry was consistently in slump and decline. It is not in the thick of its vicissitudes that people came to think of new useful establishments. Such blows to the French industry, as the maximum, the creation as well as the fall of assignats, and revolutionary taxes, have destroyed the energy of productive classes. The justice ceased to respect voluntary contracts and emancipated apprentices from their commitments, beyond its own purpose, and destroyed confidence among those who could make new contracts. Military conscriptions and requisitions took apprentices acquiring the knowledge of arts away from workshops, and discouraged apprentices as well as masters. After all, if none of these causes existed, it would always take a long time to change habits of the lower classes of a great people, and to conceive establishments which are the most adequate for them. An example given by the government can often in this case serve for impetus and can lead to the happiest changes subsequently.

Thursday 12 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 11

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 264-265]

   Il restera cependant toujours des jeunes gens qui dénués de fortune, ne pourront point suivre ces écoles dispendieuses, et continueront à s’assujettir au bail d’apprentissage, dont la condition est de compenser par un travail gratuit, pour un terme fixé, la peine que l’on a donnée à son maître, et le dégât que par maladresse, on a occasionné dans son atelier au commencement de son apprentissage. Peut-être arrivera-t-il par la suite, que le maître payera l’instruction de son apprenti à un de ceux qui feront le métier d’instituteur, pour qu’il possède son art plutôt et mieux; en sorte que la classe la plus pauvre profiterait tout comme l’autre des écoles que la liberté fera ouvrir. Elle profitera tout au moins des lumières que répandront l’émulation et le redoublement d’activité. Quant à la nation entière, ce sera un grand avantage pour elle, que celui de voir ses jeunes artisans se perfectionner dans leur métier deux ou trois ans plutôt; la masse d’ouvrage utile que produira la population actuelle de l’Etat en sera augmentée, et par conséquent le revenu national s’accroîtra.

[Translation]

   However, some young men will be unable to attend these expensive schools for lack of means, and will continue to obey to the long-term apprenticeship, whose condition is that gratuitous labour for a certain time on the side of apprentices should compensate the pains that they have given to their master, and the harm that they have done to his workshop by their unskilful labour at the beginning of their apprenticeship. Probably it will subsequently happen that the master will pay for the instruction of his apprentices to one of those who will do the business of instruction, for them to acquire arts more promptly and better. As a consequence, the poorest class as well as the other classes would benefit from the schools that freedom will make open. This class will benefit at least from insights spread by emulation and reinforcement of activity. As for the nation as a whole, it will be a great advantage for her to see her young artisans prepared for their business two or three years earlier. The amount of useful labour performed by the current population of the state will be larger, and, as a consequence, the national revenue will grow.

Wednesday 11 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 10

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 262-263]

   Désormais que toutes les portes sont ouvertes pour arriver au commerce et aux arts, comme l’artisan qui ne travaille pas bien, reste sans ouvrage, et que le négociant qui n’entend pas les affaires se ruine, tous ceux qui se destinent à l’un ou l’autre de ces états, n’ont pas moins d’intérêt qu’autrefois à savoir bien leur métier; mais il est probable que tous n’y arriveront pas à l’avenir par la même route. Ceux pour qui le temps est plus précieux que l’argent, payeront leur instruction, et en feront leur affaire unique. La demande de maîtres qui enseignent leur métier, engagera plusieurs négociants et plusieurs artisans distingués, à faire de l’art de former promptement des élèves l’objet principal de leur industrie. Ces maîtres consacreront tous leurs soins à bien enseigner, et leurs élèves toute leur ambition à apprendre promptement, pour se trouver plutôt en état de gagner leur vie. La science du négociant sera ramenée à ses vrais principes, rien de ce qui en fait partie ne sera oublié, l’émulation aiguisée par l’intérêt personnel agira sur l’écolier et sur l’instituteur, et l’on verra se former en six mois ou une année, de bien meilleurs apprentis, dont les connaissances seront bien plus étendues et plus approfondies, que ceux qui se forment avec penne, en trois ou quatre ans (3).

[Translation]

   Given that all doors are open for commerce and arts, the artisan can finds no job if he does not work well, and the merchant ruins himself if not well informed of his business affairs. Therefore, whoever tries to be an artist or merchant takes as much, or more, interest as before in understanding his business well. However, it is probable that every one will not arrive there by the same route in the future. Those who think time more precious than money will pay for instruction, and will concentrate to receiving it. On the side of the master who gives instruction, it will be demanded that several distinguished merchants and artisans should take the art of training students for the principal object of their industry. These masters will devote all their attention to giving good instruction, and their students will devote all their ambition to speedy learning, in order to be able soon to live on their own. The science of the merchant will be sublimed to his true principles, all of its parts will be conserved, the emulation provoked by private interests will work upon both the learner and teacher, and we shall see much better apprentices prepared with more extensive and profound knowledge after six months or one year training, than those barely prepared after three or four years training today (3).

Tuesday 10 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 260-262]

   Parmi les artisans, il est de l’intérêt du maître de rendre son élève propre au travail le plutôt qu’il le pourra, afin d’en profiter plus long-temps; mais chez les négociants il n’en est pas de même; car le travail que les apprentis font chez eux, peut leur être tout aussi utile, lorsqu’ils ne s’instruisent pas, que lorsqu’ils s’instruisent: qu’ils tiennent en bon ordre les marchandises, qu’ils fassent les paquets, qu’ils gardent le magasin, qu’ils copient les lettres, qu’ils tiennent même les livres, tout cela n’en fera pas de bons négociants, mais bien des domestiques très utiles au comptoir: aussi les commerçants portent-ils l’insouciance sur l’instruction de leurs apprentis à un excès vraiment scandaleux. Jamais ils ne s’occupent de les former, ils se contentent de leur permettre à force d’attention de surprendre leur secret. Rarement ils leur enseignent à connaître la marque des prix, qui cependant doit servir de clef et d’explication à toutes les opérations qu’ils leur voient faire: ils attendent qu’ils la devinent d’eux-mêmes; plus rarement encore ils leur expliquent les motifs de leurs négociations, ou en parlent franchement devant eux; quant aux notions générales du commerce, il n’est point assez fréquent qu’ils les possèdent, pour qu’ils puissent les communiquer. La connaissance des marchandises est la seule chose que les apprentis acquièrent dans un magasin: ce n’est pas sans doute une connaissance peu importante pour eux; mais comme elle n’est presque d’aucun fruit pour ceux qui les emploient, ils mettent beaucoup de nonchalance à la leur communiquer. L’arithmétique, l’art de tenir les livres, et toutes les autres parties de l’éducation d’un négociant, resteraient constamment étrangères à l’apprenti, s’il ne prenait pas des maîtres particuliers pour s’y former.

[Translation]

   Among artisans, it is in the interest of the master to prepare his student for labour as soon as possible, because this enables him to profit from the student for a longer time. But the same is not true of merchants, because the labour performed by apprentices in this trade can be exactly as useful to his master when they are not trained as when they are so. These apprentices can place goods in good order, wrap them, keep the store, copy letters, and even keep the books. None of these is confined to able merchants, but all are open to most domestic servants useful behind the counter. Therefore, the merchant is indifferent to the instruction of his apprentices to a truly scandalous degree. He never concentrates upon training them, and contents himself with allowing their attention to reveal the secret to them. He rarely teaches them to understand the mark of prices, though it should serve as key and explanation to all operations that they see him perform. He waits for them to become able to do so by themselves. He still more rarely explains to them the incentives of business dealings, or talk about these frankly in company with their apprentices. When it comes to general notions of trade, he does not so usually have the notions as to be able to communicate them to his apprentices. The knowledge of commodities is all that apprentices acquire in a shop. No doubt this knowledge is not unimportant to them, but almost fruitless for the merchant who employ them, and, therefore, he is extremely indifferent to communicating it to them. Apprentices would be constantly kept from arithmetic, art of bookkeeping, and all other parts of commercial education if they did not take particular masters in order to receive training.

Monday 9 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 08

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 259-260]

   Pour obtenir de l’autorité Souveraine, qu’elle confirmât le monopole que s’arrogeaient les corps de métiers et les négociants, il leur avait été nécessaire de lui persuader que ce moyen était le seul praticable pour assurer l’instruction des artisans. On dirait que cette instruction est la chose du monde la plus difficile à acquérir, et qu’il faut des années pour rendre un homme propre à faire une ou deux opérations, qui souvent le rapprochent plus des machines que des êtres raisonnables; tandis que l’on n’a jamais cru à la nécessité d’un apprentissage pour exercer l’agriculture, qui demande un concours de connaissances et d’aptitude à des opérations délicates, plus grand qu’aucun art mécanique, et que le paysan n’acquiert cependant que par une longue routine. Dans le fait, l’apprentissage est le mode d’enseignement qui doit le plus retarder l’instruction, car il émousse ou détruit absolument le désir d’apprendre chez l’élève, désir sur lequel on doit bien plus compter que sur celui d’enseigner du maître. Le jeune homme n’ayant à espérer aucun avantage en compensation de son attention ou de ses progrès, et voyant devant lui le long terme pendant lequel il est condamné à travailler pour un autre, ne se propose que de s’acquitter de sa tache avec le moins de gêne et de fatigue qu’il le pourra: l’apprenti n’est rappelé à son devoir que par l’obéissance, l’ouvrier libre l’est par son intérêt. L’un s’étudie à combattre son maître, et à se refuser à l’instruction; l’autre se ligue avec son maître contre sa propre paresse.

[Translation]

   In order to have the sovereign authority guarantee that it will confirm the monopoly claimed by associations of artisans and merchants, it would have been necessary for them to persuade it that this means was the only practicable one for ensuring the instruction of artisans. It would be said that this instruction is the most difficult in the world to acquire, and that it will takes some years to prepare a man for one or two operations, which often make him a kind of machine rather than a kind of reasonable being. On the other hand, it has not been believed that apprenticeship is necessary for doing agriculture, which demands a coincidence in a human being of knowledge and aptitude for delicate operation, more than any mechanical art, and which nevertheless the peasant acquires only by a long routine. In fact, apprenticeship is the mode of education which must delay the instruction the most, because it weakens or completely destroys the desire to learn on the side of the student, a desire upon which we should rely much more than upon that of teaching on the side of the master. The young man, not having to hope for any advantage in compensation of his attention or progress, and seeing before him the long period during which he is prohibited from working for another, intends only to be released from his task with as little pain and fatigue as he can. The apprentice is only aware of his task through obedience, while the free labourer is so through his interest. The former devotes himself to resistance to his master and to refusal of the instruction, while the latter associates himself with his master against his natural idleness.

Sunday 8 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 07

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 257-259]

   D’une part, ils éloignent du travail productif des gens laborieux, qui trop pauvres pour payer un apprentissage, ou pour consacrer les plus belles années de leur jeunesse à un travail qui ne leur rapporte rien, sont obligés de demeurer toute leur vie manouvriers, ou de se borner au travail le plus grossier et le moins productif, le seul qui soit resté libre. Ces statuts diminuent donc d’alitant la production, et augmentent par conséquent les forces des vendeurs contre les consommateurs: ils augmentent d’autre part les forces des maîtres-ouvriers contre ceux qui les emploient et par conséquent leur salaire, l’un des éléments du prix de leurs produits. Mais les forces des chefs de manufacture et des négociants, dans leur lutte contre les consommateurs dont le nombre n’a point subi de variations, étant aussi augmentées, les négociants forcent les consommateurs à leur rembourser, non seulement le salaire plus élevé qu’ils ont avancé; mais aussi un profit plus fort pour eux-mêmes. Les trois effets réunis, diminution de production, augmentation de profit, augmentation de salaire, pèsent tous ensemble sur le consommateur, et se confondent pour lui dans l’élévation du prix de toutes les marchandises dont il a besoin. Le monopole que produisent les statuts d’apprentissage est donc doublement onéreux à la nation, puisqu’il entrave son industrie, et qu’il augmente ses dépenses.

[Translation]

   On the one hand, they keep laborious men from productive labour, who, too poor to pay for apprenticeship, or to devote the most beautiful years in their youth to a kind of labour which has given no reward to them, are obliged to continue to be day-labourers all in their lives, or to be confined to the least demanding and least productive labour, the only one which has remained free. These statutes, therefore, make production all the smaller, and thereby increase powers of sellers against consumers. On the other hand, they increase powers of master labourers against those who employ them, and, therefore, their wages, one of the components of the price of their produce. But, since the powers of the master manufacturers and merchants, in their haggling against the consumers who do not vary in number, were also increased, the merchants force the consumers not only to repay to them higher wages that they have advanced, but also to pay them higher profits. The three effects united, diminution in production, rise in profit, and rise in wages, weigh altogether upon the consumer, and are compounded for him into rise in prices of all commodities that he needs. The monopoly produced by the statutes of apprenticeship is, therefore, costly to the nation in a doubly way, in that it restrains her industry and increases her expenditure.

Saturday 7 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 06

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 256-257]

   Les statuts d’apprentissage, oppressifs pour tous les citoyens comme vivant de leur industrie, ou pouvant être réduits à en vivre, sont également oppressifs pour tous les citoyens comme consommateurs: ils contribuent en effet de plusieurs manières à faire hausser les prix.

[Translation]

   The statutes of apprenticeship, which are oppressive to all such citizens as live on their own industry, or as are forced to live on it, are also oppressive to all citizens as consumers. They, in fact, contribute to rise in prices in several ways.

Friday 6 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 05

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 256-257]

   Le droit de chaque individu au déploiement de toute son industrie, est l’un des plus sacrés et des plus inviolables de ceux qui appartiennent à l’homme. Quoique chaque citoyen n’ait pas dessein d’exercer une profession, ou d’entrer dans le commerce, la liberté de tous est blessée lorsque ses facultés sont restreintes à cet égard, sans avantage pour la société, et lorsque l’un des moyens de pourvoir à sa subsistance lui est ôté, non pas en faveur de la sûreté commune, mais pour multiplier les jouissances d’un autre individu que la loi lui préfère. Le riche lui-même doit voir avec inquiétude, les barrières de l’apprentissage s’étendre autour de toutes les professions pour en fermer l’entrée, car si sa fortune vient à l’abandonner, le travail qui pourrait seul suppléer à ses pertes lui demeurera interdit. Mais c’est surtout pour le pauvre qu’une pareille loi est barbare; elle donne en effet au riche, à celui dont l’état est déjà assuré, le droit de lui vendre la permission de travailler, au prix qu’il voudra bien y mettre lui-même. Il la lui vend, en effet, soit moyennant le sacrifice de plusieurs années de servitude infructueuse dans l’âge de sa plus grande vigueur, soit contre une somme d’argent, qui aurait pu suffire à donner le premier mouvement à son travail, et assurer sa subsistance pendant le reste de ses jours.

[Translation]

   The right of each individual to display all his industry is one of the most sacred and the most inviolable of all those which belong to man. Though every citizen has no intention to engage in a profession or enter into business, the freedom for all is marred if his faculties are restrained in this respect with no advantage for the society, and if he is deprived of one of the means to provide for his subsistence, not in favour of common security but in order to multiply the enjoyments of another individual whom the law prefers to him. The rich man himself should see with concern the barriers of apprenticeship extended around all professions for prohibiting others from entering into them, because, if he has drawn his fortune from his business, he will not be allowed to place it into the other business without which he could not compensate his losses. But it is especially for the poor man that such a law is cruel. The law, in fact, gives the rich (that is, those whose state is already secured) the right to sell the permission to work to him, at the price that he himself likes to attach to it. The rich sell it to him, in fact, for the sacrifice of several years of fruitless servitude in the age of his greatest vigour, or for a sum of money, which could have been sufficient to give the first impetus to his labour, and to secure his subsistence during the rest of his life.

Thursday 5 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 04

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 255-256]

   Il eût été difficile d’empêcher les négociants ou les maîtres d’un métier d’arrêter entr’eux de semblables conventions; mais l’autorité souveraine ne pouvait sans aveuglement les confirmer (2). Elle autorisait par là, elle consolidait une double ligue formée contre la société entière, d’une part pour tenir dans la dépendance la classe des gens industrieux, de l’autre pour réduire les consommateurs sous le joug des négociants.

[Translation]

   It had been difficult to prevent master merchants or manufacturers from seceding from similar conventions among them, but the sovereign authority could not confirm them without indiscretion (2). That means that it authorised and consolidated a double line formed against the whole society, to put the class of industrious men in dependence on the one hand, and to force consumers to be under the control of merchants on the other hand.

Wednesday 4 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 03

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 252-255]

   Une fois maîtres d’ouvrir et de fermer la porte des professions lucratives, ils attachèrent les conditions les plus onéreuses à la condescendance qu’ils voulurent bien avoir encore d’enseigner leur métier; les jeunes gens reçus en apprentissage, non-seulement s’engagèrent à travailler pour eux sans rétribution, pendant un espace de temps toujours long, et toujours disproportionné à l’instruction qu’ils devaient recevoir, mais encore ils durent se soumettre à n’être que les domestiques de leurs égaux, se plier à une obéissance avilissante, et s’abaisser à des fonctions auxquelles les usages de la société ont attaché du ridicule ou du mépris. L’on sait que dans les villes d’Allemagne, les apprentis négociants doivent, un falot à la main, comme feraient les autres domestiques, aller chercher la femme de leur maître, à la porter des assemblées dont l’entrée leur est interdite. Une politique bien peu honorable a suggéré sans doute aux négociants allemands le projet d’avilir ainsi l’état par lequel ils ont tous dû passer. Ils ont voulu par là s’assurer d’écarter de leur profession, ceux que leur naissance et leur éducation rendraient plus délicats sur le rang qu’ils consentiraient d’occuper, parce que c’était ceux-là même, qui, possédant ordinairement le plus de capitaux, pouvaient leur faire la concurrence la plus dangereuse pour eux, et la plus utile pour le consommateur. Les négociants français n’ont point imité cette morgue allemande, ils n’ont pas poussé non plus la rapacité comme les Anglais, jusqu’à demander à l’apprenti, outre un service de sept ans, une compensation pécuniaire. La durée des apprentissages fixée par les statuts des six corps de marchands de Paris, était de trois ans pour les moins rigoureux, et de cinq pour les plus sévères, à la réserve du corps des orfèvres et joailliers qui exigeait un apprentissage de huit ans (1). Ces apprentissages étaient presque toujours gratuits de part et d’autre. Les statuts étaient cependant conçus de manière à assurer le monopole des marchands, sans pourvoir le moins du monde à l’instruction des élèves; car d’une part il était interdit à un marchand de tenir plus d’un apprenti il la fois, et de l’autre il n’était point obligé à en avoir un; ceux qui craignaient d’introduire dans leur maison quelqu’un qui pût se mettre au fait de leurs affaires, ou qui aimaient mieux l’obéissance implicite d’un domestique , que celle toujours incertaine d’un jeune homme doué de fierté, pouvaient donc ensevelir toutes leurs connaissances dans le secret, sans qu’il fut permis à leurs confrères de suppléer à leur négligence, en formant un plus grand nombre d’élèves.

[Translation]

   Once masters opened and closed the door to lucrative businesses, they attached the most bothersome conditions to the condescension that they badly wanted from teaching their trade. Young men allowed to enter into apprenticeship were not only found to work for the masters with no pay, usually for too long a time to match with the instruction that they had to receive; they also continue to resign oneself to being no better than domestic servants of their equals, living in degrading obedience, and carrying out duties to which the social convention attached ridicule and scorn. It is generally known that in German cities, apprentices for retailers should, as their other domestic servants would, go looking for the wife of their master with a lantern in hand, to the door of assemblies that they are forbidden from enter. Certainly, dishonourable calculation inclined German master retailers to degrade in this way the state through which they must all have gone. They hoped that this would certainly keep from their trade those whom birth and education would make more delicate in the ring that they would consent to occupy, because that these men, usually with the most capital, were able to be in the competition which is the most dangerous to the masters and the most useful to consumers. French retailers have not imitated this German arrogance, nor have they pursued greed so far as to demand apprentices a pecuniary compensation, besides seven years of service, like English counterparts. The duration of apprenticeship, specified by statutes of the six associations of merchants in Paris, was three years for the least rigorous, and five years for the most severe, except the associations of goldsmiths and jewellers which asked for eight years of apprenticeship (1). These species of apprenticeship were almost always without reward on both sides. The statutes were, however, intended to assure merchants of monopoly, without providing instruction for students in the least. That is because a merchant was prohibited from maintaining more than one apprentice at the same time on the one hand, and because he was not obliged to have one apprentice on the other hand. Those who feared introduction into their house of some one who was well informed of their affairs, and who liked the implicit obedience of a domestic servant, better than the uncertain obedience of a young man talented with pride, could, therefore, hold back all their knowledge, without allowing their colleagues to train a large number of students and to supply their negligence.

Tuesday 3 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 02

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 251-252]

   Dans chaque métier, les statuts d’apprentissage ont été faits originairement par ceux qui étaient déjà reçus maîtres; il n’est point étrange que ceux-ci cherchassent à écarter de nouveaux venus, qui pouvaient leur faire concurrence, et diminuer leurs profits en les partageant: aussi tous les métiers ont-ils cherché à rendre difficile l’entrée de leurs corps. Ils ont fait choix pour cela de deux expédients, celui d’empêcher tout homme d’exercer leur profession, s’il n’avait pas dûment accompli toutes les conditions qu’il leur plairait de lui prescrire, et celui de rendre ces conditions aussi dures et aussi pénibles qu’ils le pourraient. Comme il n’y a point d’école pour les arts mécaniques, ni pour le commerce, ces maîtres se trouvaient déjà avoir le pouvoir de repousser tous ceux qui pourraient par la suite rivaliser avec eux, en leur refusant l’instruction qu’eux seuls étaient en état de leur donner. Cependant, comme d’une part les gens à talent, pouvaient par la seule force de leur esprit, et leur constante application, suppléer à l’instruction qu’on leur refusait; et comme de l’autre, l’intérêt d’éloigner des concurrents n’était pour les marchands qu’un intérêt de corps, qui chez chacun d’eux pouvait être étouffé par l’intérêt particulier; ils jugèrent à propos de se lier par des règles communes, de les faire sanctionner par l’autorité souveraine, et d’exclure au moyen de cette même autorité, de toute participation aux métiers qu’ils exerçaient, ceux qui pourraient leur faire concurrence par leurs seuls talents naturels.

[Translation]

   In every trade, the statutes of apprenticeship were originally erected by those already recognised as masters. It is not absurd that they seek to oust new comers who might compete with them and might fetch their profits down by taking a part from them. Thus, in all trades they sought to make it difficult for any other person to entry into their trade associations. For this purpose, they chose from two expedients, one of which was to forbid every man from engaging in their business if he did not properly meet all conditions arbitrarily imposed upon him, and the other of which was to make the conditions as tough and bothersome as they could. Since there is no school for these technical arts or commerce, it transpired that these masters were already entitled to reject those who could soon be their rivals, by denying them the instruction that the masters are alone able to give them. However, talented men were able to supply their lack of instruction with all their own intellect and constant application, on the one hand, and it was only in the interest of their association for the merchants to escape competition, with the result that the association might be broken up due to their different individual interests, on the other hand. Therefore, the masters felt more like being under general regulations, having the regulations sanctioned by the sovereign authority, and wishing this authority to exclude every one who could compete with them with all his own natural talents, from any participation in the trades in which they were engaged.

Monday 2 August 2010

Book 3, chapter 4, paragraph 01

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 250-251]

Je n’ai point entrepris de traiter de toutes les parties de l’économie politique; mes forces ne suffiraient point pour parcourir une aussi vaste carrière. On pourrait par exemple, faire beaucoup de recherches non moins importantes que curieuses, sur les moyens de communiquer de l’instruction aux classes industrieuses de la société, et de les mettre en état d’exercer leurs professions avec une plus grande intelligence, et un plus grand succès; mais il faudrait pour s’y livrer, réunir une masse d’observations et de connaissances qui me sont étrangères. En traitant des apprentissages, je n’ai donc dessein d’examiner autre chose, que le monopole que sous ce prétexte les statuts mercantiles accordaient, soit aux marchands, soit aux maîtres ouvriers; monopole détruit par la révolution, et que plusieurs marchands désireraient que les lois renouvelassent.

[Translation]

I have not attempted to deal with all parts of political economy; I would not be able enough to cover such a vast area. You could, for instance, do much research not only curious but also important, concerning how to give instruction to the industrious class of society, and to enable them to do their business with more intelligence and more success. But, in order to devote yourself to that research, you would need to be successful in many observations and acquaintances which are unfamiliar to me. In dealing with apprenticeship, therefore, I only aim to examine the monopoly which was accorded on this pretext by mercantile laws to master merchants or manufacturers. This monopoly was destroyed by the revolution, and is expected to be restored through laws by several merchants.

Sunday 1 August 2010

Book 3, chapter 3, footnote 09

[De la richesse commerciale, Sismondi, 1803, Original, 242]

(9) Pour développer les moyens d’assurer la perception des droits conservés, et de mettre obstacle à la contrebande, il faut des connaissances pratiques d’administration auxquelles je suis loin de prétendre. On peut trouver des idées lumineuses à cet égard dans les Recherches sur l’impôt du tabac, par Fabre de l’Aude, membre du Tribunat. Ses deux propositions, de réunir sous une seule régie la surveillance et la perception de toutes les contributions indirectes, et d’exiger des acquits-à-caution pour la circulation des marchandises taxées, méritent de fixer toute l’attention du Législateur.

[Translation]

(9) In order to develop the means by which to ensure the collection of remaining taxes, and to prevent smuggling, it is necessary to have practical knowledge of administration, from which I am far. You can find some enlightening ideas in this respect in the Recherches sur l’impôt du tabac, by Fabre from Aude, a member of the tribunate. His two proposals to put the surveillance and collection of all indirect taxes into the hand of a single ministry, and to demand bond notes for circulation of taxed commodities, are worth all attention of the legislator.